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Rebecca Dautremer

Gaëlle Perret
1 novembre 2006

Passionnée de photographie, Rebecca Dautremer se voyait plutôt photographe justement, et pensait design, graphisme. Une rencontre avec la directrice artistique des éditions Gaultier Languereau change le cours de son destin et c’est le début d’une belle collaboration. Tant mieux pour nous !


En quelques mots, quel est votre parcours ?

J’ai 35 ans, je suis née à Gap et j’ai fait mes études à Paris dans les années 1990 (atelier préparatoire puis Arts Déco, cursus graphisme...)




Vous destiniez-vous déjà a l’illustration jeunesse ?

Pas du tout, j’étais plutôt intéressée par le design, le graphisme, la photo surtout. La rencontre des éditions Gaultier Languereau est un coup de chance, je ne m’orientais pas à priori vers l’édition. Gaultier Languereau cherchait quelqu’un pour illustrer de l’imagerie, des coloriages, des décalcos ! Des choses simples... Nous nous sommes très bien entendues, la directrice artistique et moi-même, puisqu’elle m’a confié dès la sortie de l’école l’illustration d’un premier album, puis d’un second…

D’autres éditeurs m’ont contacté en voyant mon travail, et les projets ont commencé à s’enchainer petit à petit...

Pendant longtemps, j’avoue que j’ai eu le sentiment de pratiquer en touriste. Aujourd’hui j’assume pleinement mon statut d’illustrateur et j’y emploie tout mon temps.

A partir de quand avez-vous trouvé votre style ?

En 1996, j’ai illustré un texte de Maurice Genevois, La chèvre au loup, des illustrations très classiques mais cela m’a permis de voir comment ça marchait, ce fut une 1ère expérience. Au clair de la terre, mon second album était déjà une recherche un peu plus personnelle mais c’est vraiment à partir de L’amoureux, que j’ai commencé à me sentir à l’aise, à savoir ce que j’avais envie de faire… Avec Sentimento, je me suis sentie plus libre, la facture est plus spontanée... Avec Le grand courant d’air, j’ai eu envie de me renouveler, je voulais faire un dessin très jeté au départ, changer de technique, proposer autre chose. De toute façon on peut sans fin progresser et se remettre en question !

Quelles sont les rencontres qui vous ont marqué ?

La première forcément, avec la DA de Gaultier Languereau. Elle a été très patiente avec moi et fidèle ! Aujourd’hui j’ai une très grande liberté de travail chez Gaultier Languereau... J’ai bien sûre eu envie parfois d’aller voir ailleurs, de connaître d’autres éditeurs et d’autres méthodes de travail, j’ai ainsi collaboré avec le Père Castor Flammarion pour Nasreddine avec Odile Weulersse... Un autre projet est en cours.

J’ai également travaillé avec une plus petite maison d’édition, Bilboquet, pour Sentimento. L’aventure me tentait, je me suis beaucoup investie, l’expérience n’a pas été des plus faciles mais la porte n’est pas fermée...

Il y a bien sûr les rencontres avec les autres illustrateurs, c’est toujours agréable de se retrouver. Dans ce milieu les égos ne sont pas surdimensionnés, ça fait du bien.

Il y a aussi les auteurs avec lesquels je travaille. Philippe Lechermeier, c’est une belle rencontre pour l’album Princesses..., c’est la première fois où j’ai eu de véritables échanges avec un auteur. Il avait envoyé son texte chez Gaultier Languereau. On me l’a proposé. On a retravaillé ensemble sur le rythme du livre, sur certains personnages dont j’avais envie de faire le portrait aussi. C’est quelqu’un qui est très à l’écoute...

Je travaille également avec Taï marc Le Thanh dans des conditions d’échange tout aussi bonnes. Avec lui, nous concevons ensemble la totalité de l’album, du texte à la composition des images.




Ce n’est pas toujours évident de travailler avec un auteur ?

Pas toujours en effet, cela dépend de la personnalité de chacun. Certains n’acceptent pas d’avoir de retour sur leurs textes, ne sont pas prêts à les faire évoluer, d’autres sont plus à l’écoute... Certains ont un avis très précis sur l’illustration de leur texte, d’autres vous font entièrement confiance.

Quels sont vos projets en cours et à venir ?

Pour la rentrée 2007, un nouveau projet avec Lechermeier. Avec Le Thanh également nous travaillons sur la création d’un personnage récurrent, « le mouton Séraphin ». Avec Carl Norac, nous préparons un album sur le jazz qui devrait sortir chez Didier Jeunesse en 2008. Sinon la sortie de mon prochain livre, La tortue géante des Galapagos est prévue en novembre. L’album est conçu comme une pièce de théâtre, avec auteur, biographie, critiques et affiche fictifs,...Je suis l’auteur des textes pour cette fois, j’avoue ne pas être très sûre de moi ! J’ai pensé confier le projet à quelqu’un d’autre mais Gaultier Languereau m’a dit on fonce, on va jusqu’au bout, c’est ton projet !

C’est un prétexte pour réaliser un ensemble de portraits assez étranges d’animaux costumés. J’ai hâte de voir le résultat !

Quelle est votre technique de prédilection ?

Je travaille essentiellement à la gouache, par petites touches, sur du papier aquarelle, j’huile un peu le papier pour densifier au mieux la couleur. Je suis plutôt grand format (110 ou 120%).




Vos sources d’inspirations ?

Je regarde beaucoup moins qu’avant ce que font les autres illustrateurs. Par contre je m’inspire beaucoup de la photo, j’ai des tonnes de livres de photographie, je regarde les cadrages, les couleurs, les lumières, le cinéma aussi m’inspire, j’essaie de travailler comme un photographe, en réfléchissant à la composition, à la profondeur de champ, en utilisant le flou... J’aime vraiment la photographie, j’ai des carnets de croquis, j’y colle mes polaroids, je feuillette mes piles de bouquins, une image me saute aux yeux et hop... mais au final je réussis mieux mes images avec un pinceau qu’un appareil photo...

Vos illustrateurs jeunesse préférés ?

J’admire certains illustrateurs qui ont des styles très éloignés du mien, comme André Bouchard ou Quentin Blacke évidemment. En vrac je pourrais citer Lisbeth Zwerger, Pierre Mornet, Elodie Nouhen, Emmanuelle Houdard ...

Etes-vous adepte des interventions en milieu scolaire ?

L’an dernier je suis souvent allée sur le terrain, toujours à la demande d’un(e) instit(e). Volontairement il s’agit toujours d’interventions courtes, je parle surtout technique : comment faire un livre ? Je montre des originaux, je fais toucher le papier, sentir la peinture, j’essaie de montrer le cheminement de l’idée au bouquin en librairie. En général, les instits ont fait un beau boulot avant, les enfants sont déjà conquis...

Qui sont vos plus fidèles lecteurs ?

D’abord les enfants, bien sûr. Leurs réactions sont souvent très sincères. L’amoureux a été monté deux fois en pièce de théâtre par des classes, j’ai assisté une fois à une représentation, ils sont allés beaucoup plus loin que le livre. C’était très touchant. Une autre fois, j’ai rencontré une petite fille de 8 ans qui connaissait tout le livre des princesses par cœur, les renvois, les vignettes, la pagination. C’était son livre préféré. J’ai souvent des petits mots qu’on me glisse dans mon carton à dessin que je découvre en rentrant chez moi, une fois «tu dessines aussi bien que Clémence » ou celui d’un petit garçon que je garde précieusement : « Je t’aime Rebecca. Tu es la plus belle illustratrice... », etc. ça fait toujours du bien !

Mais sur les salons, plus de la moitié des personnes qui viennent me rencontrer sont aussi des adultes et pas forcément des parents. Ils sont nombreux à collectionner les livres jeunesse...

Quand je fais un livre, j’essaie toujours de proposer plusieurs degrés de lecture, des petits clins d’œil aux parents, Je pense à moi quand je lis des livres à mes enfants et que je m’ennuie, ça arrive souvent ! Je crois que mes images sont claires et lisibles par les grands comme les petits de toute façon...




Où peut-on voir votre travail ?

Je voudrais signaler un lieu très sympathique et assez novateur, il s’agit de la maison des contes et des histoires, rue Pecquay à Paris, c’est une galerie d’art et un lieu de contes pour les enfants qui propose des expos (à louer, itinérantes) d’illustrateurs jeunesse. Le concept est intéressant, les dessins originaux de nombreux illustrateurs y sont en vente également. J’ai déjà exposé deux fois à la maison du conte, et je prépare une prochaine expo pour février prochain.


Je n’ai pas encore de site (à ce propos je précise que l’adresse « rebeccadautremer.com » qui existe bel et bien a été mis en ligne sans mon accord par une personne dont le projet n’a pas abouti). Je n’y suis pour rien dans cette affaire mais je m’occuperai sûrement un jour de réaliser mon propre site quand j’aurai récupéré mon nom !


En attendant pour voir les œuvres de Rebecca Dautremer et quelques planches en avant-première de son prochain livre :

Découvrez la maison des contes : http://www.conteshistoires.free.fr/

Et visitez la galerie : http://www.jeannerobillard.com/



Entretien réalisé le 2/10/06 par Gaëlle Perret pour Ricochet

Auteurs et illustrateurs en lien avec l'interview

Illustration d'auteur

Rébecca Dautremer

française