Drapeau noir pour l'empereur

Paris 1806, Gabriel entre au lycée Napoléon, extrêmement fier de devenir partie prenante du nouvel Empire. Il se fait vite un ami, Gaspard, qui partage ses convictions. Mais Gabriel a aussi un cousin, Armand, dont le père royaliste a été exécuté pendant la Révolution. Armand lui demande le service d’aller chercher un colis (soi-disant des livres) dans une sombre boutique parisienne. Bien plus tard, Gabriel se rend compte que le colis était destiné à une manifestation contre l’Empereur. Pire, les hommes que fréquente Armand fomentent l’assassinat de Napoléon ! Mais Armand est vite arrêté, et Gabriel, pétri d’amour familial, va se débrouiller pour faire évader son cousin. Le père de Gabriel, conseiller du ministre Fouché, n’est pas dupe des manigances de son fils et de son ami Gaspard : il permet l’évasion d’Armand, envoyé en Amérique.

Le Premier Empire est une période rarement représentée en littérature jeunesse, et Nathalie Le Cleï rend bien compte des dissensions politiques, des trahisons et des complots qui traversaient encore le pays à cette époque post-révolutionnaire. Elle nous montre une France largement militarisée, galvanisée par les conquêtes de sa Grande Armée. Dans le même temps, les « parvenus de l’Empire » reproduisent plus ou moins un système de cour autour de Joséphine, entre jalousies mesquines et sorties à l’opéra… Gabriel est passionné de botanique : on vient juste de créer le Museum national d’histoire naturelle, et les voyages d’exploration enrichissent les collections comme les connaissances. Bref, la période foisonne, et nous la découvrons au fil des déambulations du héros dans Paris. L’histoire est assez machiavélique, tout à fait digne d’un Fouché, prolongée d’un épilogue en 1816 montrant bien l’ironie des basculements de l’Histoire… Cependant, elle reste difficilement vraisemblable : les héros sont trop chanceux dans leurs aventures qui se déroulent sans accrocs. Dans un contexte historique solide, se voulant lui complètement véridique (et didactique au fil des pages), le contraste est frappant.