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Compte rendu du débat "L'écologie comme on respire"

Sophie PILAIRE, étudiante en DUT métiers du livre à l'IUT Paris (12/2/2001)
1 janvier 1990

Le débat "L'Ecologie comme on respire", présenté par la maison d'édition Syros, s'est déroulé le lundi 4 décembre 2000, de 11 h 15 à 12 h 15, dans la salle de presse du Salon du Livre de Jeunesse de Montreuil. Y ont participé Noël Mamère, maire de Bègles et directeur de la collection Souris Verte chez Syros, Monique Hennequin, secrétaire générale du CRILJ (Centre de Recherche et d'Information en Littérature Jeunesse) et Bruno Rebelle, directeur général de l'association militante pour l'environnement Greenpeace. La discussion était animée par Loïc Chauveau, journaliste.



Loïc Chauveau introduit le débat en partant d'un constat : le grand public souffre d'un manque flagrant d'informations sur l'environnement, la nature, l'écologie, et ce à une époque où les recherches progressent très vite et où il y aurait justement largement matière à transmettre. Ce faisant, les comportements des adultes, et donc des enfants, n'évoluent pas et restent en grande part nuisibles à l'environnement.

Il serait particulièrement important de sensibiliser à l'écologie les jeunes, qui représentent l'avenir et chez qui on peut plus facilement changer les habitudes et les gestes quotidiens. Or, le livre est un composant essentiel de l'éducation chez l'enfant.

L'objet du débat a donc été de présenter l'état de la littérature jeunesse en matière d'écologie, ainsi que de proposer quelques pistes pour le futur dans ce domaine.



UN BILAN DECEVANT



Le CRILJ a réalisé une étude sur le traitement du thème de l'écologie dans l'édition jeunesse, que résume la secrétaire générale du centre.

Le bilan est assez décevant : aucune collection de documentaires n'existe, seuls quelques titres se détachent, comme L'Ecologie à petits pas chez Actes-Sud Junior.

Les encyclopédies (Larousse, Bordas) abordent le sujet en 2 ou 3 pages générales.

L'écologie est rarement traitée dans les albums, qui seraient pourtant des vecteurs efficaces (Schproutz, aux Editions du Rouergue, parle avec humour de la pollution de l'air). Bien sûr, les ouvrages seulement imagés, destinés aux plus jeunes, nécessitent d'être médiés par un adulte (un parent…).

Les ouvrages, quel que soit leur genre, sont souvent réalisés avec la participation d'une ONG (Organisation Non Gouvernementale), d'une association ou d'une institution. 30 Mots-clés pour comprendre la radioactivité, chez PEMF, a ainsi été fait avec l'aide du CEA (Commissariat à l'Energie Atomique) et du CRIRAD (Centre de Recherche et d'Information sur la Radioactivité).

Les périodiques destinés aux jeunes, comme Les Clés de l'Actualité ou Le Journal des Jeunes, traitent abondamment de l'environnement, mais de manière factuelle. Ils n'invitent pas vraiment à une réflexion pédagogique ultérieure.

Enfin, tous ces documents sur l'écologie sont en général destinés aux enfants de 7-10 ans ; il n'y a pratiquement rien pour les adolescents.

La secrétaire du CRILJ précise que le centre tient à disposition de tout public des bibliographies sur l'écologie, l'environnement, ou un autre thème plus spécifique.



M. Mamère présente ensuite la collection Souris Verte chez Syros Jeunesse, qu'il a créé et dirige depuis un an et demi. Il s'agit de fictions policières menées par des enfants, toujours centrées sur un thème ayant trait à l'écologie.

La collection s'inspire de la réalité sociale : sujets d'actualité (la "vache folle"…) et ton correspondant au monde des jeunes (l'urbanisme est ainsi abordé via des skate-boarders). Elle s'adresse à des adolescents, à partir de 11-12 ans, et constitue à ce titre une exception.

Dans chaque ouvrage, une postface de M. Mamère resitue l'histoire dans le problème écologique qu'elle pose : c'est le côté pédagogique de la collection. Le problème est de savoir si cette postface est lue ou non par l'enfant, et si elle constitue pour lui un point de départ à une réflexion. M. Mamère rappelle cependant que le rôle de l'éditeur est de donner du plaisir à lire, pas d'éduquer. Cette dernière fonction est celle des parents et de l'école.



ACCES DIFFICILE AUX JEUNES



Le directeur de Greenpeace intervient et explique que son association cherche à communiquer avec les jeunes en priorité pour les sensibiliser aux problèmes environnementaux.

Mais elle se heurte d'abord à un problème de moyens financiers : les éditeurs jeunesse, par peur d'absence de rentabilité d'un ouvrage au thème "sérieux", sont encore peu intéressés par les projets de livres sur l'écologie qu'elle pourrait proposer. Souris Verte constitue en ce sens un premier pas à poursuivre.

Elle rencontre ensuite un problème d'accès aux jeunes : pour être admis à faire une animation dans une école, un organisme doit être inscrit au registre de l'Education Nationale. Or, Greenpeace, association qui "sent le souffre" (Bruno Rebelle) n'a jamais réussi à y être inscrite. Mais de toute façon, Greenpeace privilégie l'action et la lutte : pourrait-elle faire face à toutes les demandes des écoles ? Si les besoins des professeurs devenaient importants, Greenpeace serait néanmoins tout à fait partante pour créer un service communication-jeunes en son sein.

Il n'empêche que ce sont aujourd'hui les lobbys industriels (l'EDF - Electricité De France -, l'INRA - Institut National de Recherche Agronomique -…) qui rentrent dans les établissements scolaires et distribuent des plaquettes, des brochures, des bandes dessinées... Ces documents sont de véritables publicités, orientées vers les intérêts de l'entreprise. Ils ne présentent pas les questions écologiques dans leur réalité et n'amènent l'enfant à aucune réflexion. Le directeur de Greenpeace insiste ainsi sur le manque d'ouvrages documentaires objectifs, et plus sérieux que les fictions, traitant de l'environnement.



DES ESPOIRS POUR LE FUTUR



Une directrice éditoriale de Syros Jeunesse, présente dans le public, prend pour finir la parole. Elle annonce la constitution d'un département Ecologie dans la maison d'édition, avec la création d'autres collections que Souris Verte. La collection Tante Agathe, mettant en scène avec humour une famille aux prises avec une agaçante tante écologiste, sortira ainsi en mars 2001. Elle s'adressera aux 8-9 ans. Un album, La Symphonie des baleines, vient juste d'être publié pour Noël. Le département Ecologie de Syros aura pour objectif principal d'élargir la gamme des ouvrages de la petite enfance jusqu'à l'adolescence incluse, ce qui semble manquer aujourd'hui.



Loïc Chauveau conclut le débat en rappelant l'importance, pour l'avenir de la planète, que les jeunes prennent l'habitude de gestes écologiques au quotidien, "comme on respire", c'est-à-dire sans y penser. Il s'agit là d'un devoir de responsabilité des adultes par rapport aux enfants. Tous les participants sont d'accord sur le fait que la littérature jeunesse a un rôle certain à jouer dans ce domaine, et qu'elle ne le remplit pas encore assez.