Dans la douceur de l'enfance: doudous et autres objets fétiches
Pour la Journée mondiale de la peluche, Ricochet vous propose une sélection d'albums jeunesse mettant en avant nos doux compagnons d'enfance qu'ils revêtent les traits d'un ours en peluche, d'un rebut de tissus, d'un vieux t-shirt ou de tout autre objet moins anodin.
Pour la Journée mondiale de la peluche, Ricochet vous propose une sélection d'albums jeunesse mettant en avant nos doux compagnons d'enfance qu'ils revêtent les traits d'un ours en peluche, d'un rebut de tissus, d'un vieux t-shirt ou de tout autre objet moins anodin.
1. Dou et son doudou, de Johan Leynaud, Sarbacane, 2017
Album, dès 1 an
Dou se gratte la tête: où peut bien être son doudou? Peut-être dans le coffre à jouets? Eh bien non. Dans l’armoire? Dans la machine à laver? C’est parti pour la grande exploration, à la recherche du fameux doudou tant convoité. Au passage, une balle est ramassée, un gâteau dévoré… mais point de doudou trouvé! Vient alors le moment de demander de l’aide aux parents qui suggèrent bien vite un lieu oublié: le lit de Dou! Et maintenant, il ne reste plus qu’à tout ranger!
Qu’il est amusant, ce petit personnage tout en rondeur, qui fait des bêtises à presque toutes les pages! Le jeune lecteur s’amusera très certainement de voir les interdits bravés et le bazar engendré. Quant à l’enquête, elle évoquera bien sûr le quotidien du jeune lecteur, qui s’est nécessairement retrouvé dans une semblable situation. Voici un album très divertissant pour les plus jeunes lecteurs, qui sauront maintenant où se cachent le plus souvent les doudous lorsqu’ils disparaissent mystérieusement. (DM)
2. Mon ours, d’Ilya Green, Nathan, 2019
Album, dès 2 ans
Accompagné de son ours en peluche, un petit enfant à l’air mutin s’imagine vivre dans la forêt. Un chat se transforme alors en tigre féroce; la piscine gonflable, en rivière gorgée de poissons à pêcher… Vite, il faut se cacher: papa arrive avec le goûter! «C’est que ça donne faim, la vie sauvage!»
Livre cartonné pour les tout-petits (dans la lignée de Mon château et Mon bébé), Mon ours raconte le plaisir du jeu de l’imaginaire et du faire semblant. Accompagné de textes simples, le travail illustratif d’Ilya Green est, comme toujours, une pure merveille. Découpage, délicats traits au crayon, aquarelle et motifs de tissus créent un monde visuel tout en tendresse et doté de touches d’humour. Le personnage de l’ours, véritable compagnon de jeu de l’enfant, ne manquera pas de toucher les petits lecteurs par son expressivité.
Une très belle découverte!
Pour les curieux, le site de l’auteure-illustratrice française vaut le détour: ilya-green.com. (NT)
3. Le foulard d’Elias, d’Anne Clairet et Michelle Carlslund, Auzou, 2019
Album, dès 2 ans
Dans la collection Jeux d’enfants, un joli livre cartonné pour le rituel de la sieste, auquel les enfants ont parfois du mal à s’abandonner. Anne Clairet redécouvre pour les lecteurs l’usage de l’objet transitionnel. Le foulard de sa maman, doux et qui sent bon, entraîne le petit Elias vers le rêve encore éveillé et les jeux imaginaires: à côté du texte, Michelle Carlslund, créatrice danoise, utilise sa maîtrise des tableaux tactiles pour imaginer le foulard en cape de super-héros, le turban d’un prince de la jungle ou encore la voile du bateau de pirates. Des morceaux de textile coloré sont intégrés au dessin, ce qui permet au petit lecteur de ressentir, avec la douceur du tissu, la grâce de ce moment. Dans l’album, Elias s’endort, enroulé dans son foulard, et bercé par la chanson de mamie, autre source de tendresse. De quoi rappeler que même pour la sieste, on n’est jamais vraiment tout seul, et que l’on peut se laisser aller au sommeil, protégé par celles et ceux qui nous aiment.
Bien utile pour les enfants, leurs parents, et peut-être aussi les personnels de crèche. (VC)
4. La disparition de chou, de Stéphanie Demasse-Pottier et Elodie Perrotin, L’Étagère du bas, 2018
Album, dès 3 ans
Lola est une mignonne petite fille, aux traits tout en rondeurs. Elle a un papa et une maman, un chat et quelques poissons en plastique pour jouer dans le bain! Elle a également un éléphant – en peluche – qui se nomme Kiko et puis surtout, il y a Chou. Chou, c’est un koala. Chou, c’est LE doudou de Lola. Chou participe à tout: aux goûters et aux aventures, aux jeux et aux nuits de Lola – mais pas au bain, c’est trop mouillé. Tout est bien jusqu’à ce qu’un jour Chou disparaisse. Lola est triste au-delà du raisonnable mais Chou ne sera pas retrouvé malgré des recherches poussées et renouvelées. Par contre, un autre exemplaire de Chou fera son apparition quelques mois plus tard grâce au cousin Bertrand…
Après Louise, La disparition de Chou est le deuxième album de Stéphanie Demasse-Pottier aux éditions de L’Étagère du bas. Elle met ici en scène un drame de l’enfance connu de nombreuses familles. L’importance du doudou dans l’existence de Lola tout autant que le drame de la disparition sont parfaitement retranscrits. Les illustrations aux traits noirs bien marqués d’Elodie Perrotin sont quant à elles dynamiques et attachantes! Cette lecture aidera assurément les plus petits à mieux vivre la perte de leur doudou et rappellera aux grands qu’il faut prévoir plusieurs modèles du doudou de son enfant! (GF)
5. Le doudou des bois, d’Angélique Villeneuve et Amélie Videlo, Sarbacane, 2016
Album, dès 3 ans
C'est le drame: Georgette a perdu son doudou, un gentil lapin gris, dans les bois. Toute occupée par les odeurs et les couleurs de l'automne, la fillette l'a soigneusement posé sur des feuilles, puis oublié. Elle n'en dort pas de la nuit. Le lendemain, Georgette repart dans la forêt, mais ne retrouve pas son doudou. Volontaire, elle décide alors d'en adopter un nouveau, un qui aura «l'odeur du dodo, l'odeur du dehors». Elle cherche, cherche au milieu des animaux perplexes, et finit par dénicher le doudou idéal, cependant pas très sage… Il s'agit d'un louveteau qui gigote!
A partir d'un début basique et d'un thème presque éculé, l'histoire devient férocement originale au fil des pages. Des éléments forts la traversent: l'absence totale d'adultes (humains ou animaux: il n'y pas de louve), la prédominance des sensations, de l'odorat à la vue en passant par le toucher, l'impression constante de refuge et de protection, que ce soit au sein d'une forêt luxuriante ou dans la chambre-terrier de Georgette.
Le suspense monte quant à la nature du doudou, cependant accordé au rythme d'un petit enfant qui prend le temps de dormir, de sentir… Il y a de la coquinerie aussi, avec ce louveteau récalcitrant que le lecteur ne découvre qu'à la dernière page: «Au début, bien sûr, ça n'était pas encore habitué à ce nouveau métier de doudou, ça a voulu s'en aller.». Le texte travaillé, soigné, tranche sur d'autres productions se contentant de l'histoire.
Sinon, la bouille arrondie de Georgette ne cesse de se montrer expressive, entre inquiétude et confiance, coiffée de cheveux bruns ressemblant aux feuilles de ces arbres rouges, marrons, mordorés… Avec des illustrations en peinture entre réalisme et rêve (l'énorme châtaigne), l'automne est la plus belle des saisons, et la forêt un écrin de malice et de douceur: on y console tous les enfants qui ont perdu leur doudou! (SP)
6. Le doudou de la directrice, de Christophe Nicolas et Maurèen Poignonec, Didier Jeunesse, 2016
Album, dès 3 ans
Que ce soit en littérature ou au cinéma, les directeurs ou directrices d'école sont souvent incarnés par des personnages austères, stricts et dépourvus d'humanité. On se souvient de la redoutable Mme Legourdin dans le roman Matilda de Roald Dahl... Ce n'est pas du tout le cas dans cette histoire où la directrice affiche une bonne humeur contagieuse et constante qui fait d'elle la personne la plus populaire de l'école. Comment fait-elle pour rester zen? Quel est son secret?
Un petit album carré qui permet de déculpabiliser les adultes et les enfants qui peinent à laisser tomber leur doudou. Comme un précieux talisman, cette jeune femme garde sa madeleine de Proust au fond d'une de ses poches. Pourquoi s'interdire le port d'une peluche si elle permet d'adoucir la vie? Une histoire fraîche et drôle à lire sans modération! (EP)
7. Un ours à la mer, de Christine Schneider et Hervé Pinel, Seuil Jeunesse, 2019
Album, dès 3 ans
Dans le maelström bleu nuit de la couverture, deux yeux inquiets, deux petites oreilles rondes et une patte d’ours émergent, associés au cri: «Un ours à la mer!».
La mise en situation est immédiate. Nous entrons de plain-pied dans le drame puisque la page de titre nous montre un voilier et sur la page initiale du récit, un jeune pirate, épée (et tétine) en l’air, répète le cri «un ours à la mer!».
Après la fulgurance de cette mise en situation, le récit se suspend et nous allons voir l’histoire à hauteur du protagoniste. Le jeune pirate fait une colère dans une mare de larmes. Il est entouré de son voilier, de sa tétine, de son épée et il trépigne. Le texte fourmille d’onomatopées où se révèle l’ironie de l’auteure. A plat ventre, notre pirate n’a plus la fière allure de l’introduction. Que s’est-il donc passé?
Petit à petit, le voile se lève. Avec beaucoup d’élégance, l’auteure et l’illustrateur jouent sur une ambiguïté fondamentale, celle du hublot, et ils entretiennent le jeu. Tantôt nous voyons la scène du côté du petit pirate qui lutte contre les éléments déchaînés, tantôt nous voyons l’ourson se débattre. Cette construction, plan contre plan, alimente le suspens. La plus belle illustration est celle des visages mouillés, côte à côte, qui montrent l’espoir et la solidarité des deux naufragés car tous deux sont engagés dans le même combat…. Le vocabulaire est choisi avec art. Il y est question de mousse, de virer, de tourner, d’essorer. Lorsque le hublot s’ouvre, tout devient clair. La tempête était celle de la machine à laver. L’image du petit pirate heureux, le nounours dans les bras, épée et voilier à ses côtés, fait écho à l’image initiale du désespoir et on participe à la joie des retrouvailles… En route pour de nouvelles aventures, ils reprennent la mer.
Cette faculté de faire aventure d’une simple opération de lavage de doudou capte la magie du jeu enfantin. Les illustrations dynamiques, de couleurs bleu, gris et noir, entretient une tension épique de lutte contre les éléments et on entend l’enfant lutter, se désespérer, reprendre espoir dans ce livre drôle et tendre où les enfants se reconnaîtront et que les parents auront plaisir à mettre en jeu pour relativiser le drame du lavage des doudous chéris ou pour le plaisir de transformer en épopée ces moments toujours un peu difficiles! (DB)
8. Les aventuriers du soir, d’Anne Brouillard, Les éditions des éléphants, 2015
Album, dès 4 ans
La fin de la journée approche. Gaspard s’est réfugié dans sa cabane au milieu de la forêt, en compagnie de son doudou Lapinus et de Mimi le chat qui se joint à eux. Ils entreprennent d’aller pêcher, mais les deux amis de Gaspard ne sont pas très intéressés par cette activité. L’enfant propose alors de s’installer dans l’arbre qui donne sur le jardin de la maison, en attendant la nuit qui se prépare à tomber. Le monde extérieur se rappelle à Gaspard et ses compagnons: le bruit lointain d’une route, la musique d’un marchand de glace… Il est l’heure de rentrer à la maison, qui réconforte par sa lumière et par le fumet du repas qui mijote et que Gaspard partage avec ses parents. Il est ensuite temps d’aller se coucher. Mais où est passée Mimi? Ah! La voilà qui vient se glisser dans le lit de Gaspard tandis qu’il dort déjà à poings fermés, accompagné de Lapinus, qui n’est jamais très loin.
Ce livre nous immerge dans un véritable cocon de douceur. Les illustrations d’Anne Brouillard, dominées par des tons jaunes et bleus, sont touchantes et suscitent un sentiment de sérénité. Gaspard se crée un univers imaginaire attendrissant: il parle à son lapin en peluche, qui est pour lui une personne à part entière. Les phrases sont courtes et efficaces, tout en finesse et en poésie: «La maison s’illumine. C’est un phare de l’autre côté de l’océan». Les mots, simples et bien choisis, nous transmettent à la fois l’apaisement et la mélancolie qu’amène la nuit en tombant. «La journée se termine. C’est doux et un peu triste». On voudrait être une petite souris et pouvoir plonger dans ces scènes remplies d’une grande tendresse, pour partager cette douce fin de journée en compagnie de Gaspard et ses fidèles compagnons.
Un album tout en délicatesse qui réchauffe le cœur, et qu’on ne se lasse pas de parcourir. (LDN)
9. Mon pull panda, de Gilles Baum et Barroux, Kilowatt, 2017
Album, dès 5 ans
C’est l’histoire d’une petite fille qui a, comme parfois, un attachement fétichiste à un vêtement, son «pull panda». Un peu armure, un peu doudou, ce pull accompagne l’héroïne narratrice tout le temps et partout: au bord de la mer, en été, à l’école, au cours de danse. Elle avoue très fort son attachement dans un langage un peu surprenant pour son âge mais que l’on comprend bien: «il me suffit d’enfiler ma capuche et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes». Cette fillette est d’une sagesse exemplaire, elle accepte de donner son pull porte-bonheur: «les vêtements porte-bonheur, il faut les partager».
L’image dément cette belle détermination, elle tend, un peu tristement, le pull à sa maman et l’on entend en sourdine le discours adulte qui fait tout pour convaincre l’enfant: elle est grande, le pull est petit, il faut «partager». Le récit est construit au niveau de la fillette. Sa pensée chemine, auto persuasion et observations du réel emportent sa conviction: le partage et la transmission des vêtements construisent des liens entre grands et petits, fortunés ou non.
Les illustrations confortent ce parcours, ses sentiments profonds émanent des images. Les adultes sont vraiment très grands, elle se sent bien petite. La fillette ne semble heureuse que lorsqu’elle est revêtue de ce panda protecteur. Le retrouver porté par une autre fillette comme un autre elle-même éclaire sa détermination et justifie le discours généreux, d’autant que la fillette qui porte le pull revient d’un pays en guerre. L’album s’achève dans l’optimisme de l’amitié construite entre elles deux.
La générosité de l’histoire, ce qu’elle raconte de notre temps, les moyens graphiques ou narratifs employés sont touchants. Un peu trop appuyée, la morale de l’histoire emporte notre adhésion mais les valeurs transmises, ce partage à hauteur d’enfants symbolisé par le pull panda, parlera à bien des jeunes lecteurs. (DB)
10. L’ourson de Fred, d’Iris Argaman et Avi Ofer, Chandeigne, 2017
Album, dès 7 ans
«Autrefois, il y a bien longtemps,
Dans un pays lointain
Qui s’appelle la Hollande,
Dans une ville qui s’appelle Delft,
j’étais l’ourson de Fred.»
Et c’est au titre d'«ourson en laine préféré» qu’il devient, jour après jour et nuit après nuit, le compagnon de jeu, le meilleur ami et le confident du petit garçon. Les rafles qui sévissent en Hollande durant ce qu’on appellera ensuite la Seconde Guerre mondiale ne font que renforcer ce lien d’amitié, Fred étant contraint de quitter ses parents et ses frères pour trouver refuge dans un premier temps chez son grand-père à Amsterdam. L’ourson devient ainsi l’oreille attentive à laquelle le jeune garçon murmure ses peines et espoirs… Quand pourra-t-il de nouveau entendre les rires de ses frères et la musique jouée par son père?
De la douillette chambre d’enfant de Delft à la vitrine du musée de Yad Vashem à Jérusalem, l’ourson retrace, dans ce récit à la première personne, son périple et nous explique les raisons de sa présence dans ce musée aux côtés d’autres jouets d’enfants qui ont été cachés ou déportés durant la guerre.
Et sous le coup de l’émotion, le lecteur tombe immédiatement sous le charme de ce «doudou» qui, par empathie avec son jeune propriétaire Fred, a subi les affres de la guerre et qui pourtant, épreuve après épreuve, a su lui porter un soutien indéfectible. C’est une formidable et authentique histoire d’amitié et un incroyable message d’espoir que nous transmet Iris Argaman, l’auteure de cet album, dont les mots empreints tantôt de douceur, tantôt de douleur sont rehaussés par de délicates illustrations. Un très bel album chargé d’Histoire et d’émotions à partager absolument! (HD)
11. La valise rose, de Susie Morgenstern et Serge Bloch, Gallimard Jeunesse, 2015
Album, dès 7 ans
A l'heure de la ronde des présents «convenables et convenus» qui marque la naissance de ce beau bébé joufflu, personne ne comprend pourquoi la grand-mère offre une valise rose fluo. L'objet si détonnant contrarie la maman. Quant au papa, il essaie d'arrondir les angles pour éviter les conflits familiaux. L'enfant devient rapidement accro à sa valise fluo qu'il utilise tour à tour comme berceau, pour apprendre à marcher et comme sac d'école jusqu'au… lycée. Ce qui permet au papa de déclarer que ce cadeau si controversé était néanmoins de très bonne qualité.
Avec humour, tact et volupté, Susie Morgenstern envoie balader les codes de la bienséance et de la normalité. Elle démontre que les enfants naissent libres d'aimer et de choisir ce qu'ils veulent (y compris les garçons qui optent pour une valise rose fluo en guise de doudou). Et tant pis si l'objet adopté ne fait pas l'unanimité! C'est aux adultes d'arrondir les angles! Les illustrations très expressives de Serge Bloch reflètent avec force et drôlerie les sentiments des personnages. Une lecture «Pépite intergénérationnelle» à déguster sans attendre! (EP)
Les rédactrices: Danielle Bertrand (DB), Véronique Cavallasca (VC), Hélène Dargagnon (HD), Laura Del Nostro (LDN), Gaëlle Farre (GF), Déborah Mirabel (DM), Emmanuelle Pelot (EP), Sophie Pilaire (SP), Nicole Tharin (NT)