Georgia Byng
Entretien avec Georgia Byng
Ricochet - On ne vous connaît pas encore en France. Pouvez-vous nous parler de vous ?
Georgia Byng - Et bien, j'écris depuis treize ans, même si ça a été sans succès pendant longtemps. Et quand quelqu'un s'est intéressé à " Molly Moon " il y a deux ans, ça m'a rendu très heureuse. J'ai commencé par être actrice de théâtre parce que depuis l'enfance, c'est la scène qui m'intéressait, mais je crois que la scène n'était pas très intéressée par moi ! J'ai fait une école de théâtre, je me suis beaucoup impliquée dans le travail d'acteur, mais quand j'ai commencé de manière professionnelle, je souffrais de devoir attendre que quelqu'un me propose un rôle. J'ai ensuite rencontré mon premier mari qui m'a permis de me détacher du théâtre, et je pensais que j'allais être peintre, mais je me suis rendu compte que je n'étais pas un très bon peintre. Je suis alors revenue vers l'intrigue dramatique en commençant à faire des bandes dessinées, mais en Grande-Bretagne, c'est très difficile de faire éditer des bandes dessinées, donc ça n'a pas abouti, en revanche, ça m'a permis d'apprendre l'écriture, et petit à petit, je me suis tournée vers le public des 9-12 ans parce que c'est celui qui me permettait le mieux d'exprimer des symboles et des concepts qui me tenaient à cœur, j'ai donc commencé à développer des scénarios plus longs. En fait, je me considère vraiment comme un écrivain qui vient du théâtre et qui est arrivé à l'écriture après un long chemin.
Ricochet - Quand Molly Moon a-t-il publié en Angleterre ?
Georgia Byng - En mai 2002.
Ricochet - Et comment a-t-il été accueilli ?
Georgia Byng - Très bien je dois dire. Il est édité en poche aujourd'hui et traduit en 34 langues. Une adaptation au cinéma est en préparation, c'est le producteur de " Harry Potter " qui l'a acheté et le scénariste de " Billy Elliot " a travaillé sur l'adaptation. Au début, ça ne me préoccupait pas trop, mais maintenant je panique à l'idée que mon histoire soit complètement différente ! De toute façon, pour moi, c'est vraiment la cerise sur le gâteau, parce que tout ce que je voulais, c'était écrire un livre qui soit publié.
Ricochet - Pour en venir au livre, comment vous est venue cette idée de l'hypnose ? Etait-ce un phénomène qui vous fascinait, personnellement ?
Georgia Byng - Non, pas vraiment, mais comme tout auteur, je cherchais l'idée force d'un livre, sur laquelle reposerait tout le scénario. Il y a toutefois un souvenir que je raconte aux enfants : un jour où je m'ennuyais, chez ma mère, j'ai pris un gâteau, je l'ai fait tourner devant les yeux du chien, et j'ai eu la sensation que je l'avais hypnotisé ! Ce qui m'intéresse dans les livres pour enfants, c'est que les enfants aient une sorte de pouvoir et l'hypnose en est un. Et surtout, ça m'ouvrait beaucoup de possibilités humoristiques.
Ricochet - Molly utilise l'hypnose pour satisfaire tous ses désirs, un peu comme une baguette magique, peut-on comparer " Molly Moon " à un conte de fées, tout au moins la première partie ?
Georgia Byng - Pour moi, il y a vraiment une dimension allégorique dans les contes de fées, cathartique même, et je ne pense pas que ce soit le cas pour " Molly Moon ". Je voulais simplement creuser cette question du pouvoir, parce que les enfants rêvent d'échapper à l'autorité des adultes. Mais peut-être, effectivement est-ce un point commun avec les contes de fées.
Ricochet - Un renversement s'opère dans la seconde partie, et là, il y a un retour progressif à la réalité, quand Molly comprend qu'elle a réalisé ses rêves et ses désirs au moyen d'un artifice, sans l'avoir mérité vraiment…
Georgia Byng - Oui, car elle comprend que pour un être humain, ce n'est pas satisfaisant d'obtenir des choses sans avoir travaillé, c'est un peu comme prendre une drogue pour se sentir bien alors qu'on est sur le mauvais chemin, ou tricher à un examen. En ce sens, le livre est quand-même un peu une allégorie.
Ricochet - A New-York, Molly succombe complètement au rêve américain, elle n'aspire qu'à la célébrité, à la richesse. Pensez-vous qu'en cela, elle ressemble aux petites filles d'aujourd'hui ?
Georgia Byng - Oui, mais ce n'est pas nouveau. Quand j'avais huit ou neuf ans, je rêvais d'être célèbre, sans savoir de quelle manière. Aujourd'hui, le rêve de ces fillettes est entretenu par les magazines comme un leurre. Dans ses aspirations, Molly, elle, cherche avant tout la reconnaissance qu'elle n'a jamais eue, et elle comprend finalement que l'essentiel, ce sont des choses intimes, qui correspondent plus à soi-même.
Ricochet - Dans le roman, quel est le déclic qui la fait revenir à la réalité ?
Georgia Byng - Je crois que c'est le fait de perdre Pétula, la petite chienne qu'elle a emmenée avec elle en quittant l'orphelinat, parce que ce chien est le dernier maillon qui la retient à sa vie antérieure, quand elle le perd, elle comprend à quel point elle a fait fausse route.
Ricochet - Comme vous nous l'avez dit, vous avez surtout voulu écrire un livre drôle. Y a-t-il toutefois un message que vous aimeriez délivrer à vos lecteurs ?
Georgia Byng - Je n'aime pas du tout les discours moralisants, et s'il y a vraiment une leçon à retenir de " Molly ", c'est que c'est le sens de l'humour qui peut sauver les enfants lorsque les adultes se trompent.
Ricochet - A la fin du roman, Molly et son ami Rocky prennent la sage décision de ne plus exercer l'hypnose, et pourtant, il semblerait qu'un deuxième tome soit annoncé…
Georgia Byng - Oui, il sortira en Angleterre bientôt et en France en 2004 (Molly Moon stops the world en anglais). Molly, qui avait juré de ne plus toucher à l'hypnose, devra quand-même revenir sur sa promesse pour faire face à une menace qui pèse sur le monde…