Thierry Lenain
Né en 1959, Thierry Lenain vit à Grenoble et se consacre à l'écriture depuis 1986. Instituteur, puis éducateur, il est aujourd'hui rédacteur en chef de la Revue "Citrouille". Auteur d'une soixantaine d'ouvrages pour les enfants, Thierry Lenain aime accompagner les enfants à travers l'écriture. Ses livres traitent souvent des thèmes graves qu'il aborde avec délicatesse pudeur et émotion. Citons Julie Capable, le Magicien-square, La fille du canal, Il faudra, Tu existes encore, C'est une histoire d'amour et découvrons cet écrivain qui lutte pour l'humanisme.
Il y a déjà un moment que je ne me projette plus dans les héros de fiction, même par jeu ;-) Je ne peux donc vous répondre qu’au passé - et au pluriel : Claudine (du Club des cinq), Rahan, Mowgli, le Surfer d’Argent, Corto Maltese, quelques privés de Série noire… Aujourd’hui, mon rapport aux personnages est celui de la proximité : il ne s’agit plus de vouloir leur ressembler mais de mieux comprendre une partie de moi à travers une partie d’eux - et ce sont avant tout des personnages de films. Quant à mes héros actuels, qui me guident et m’éclairent par leurs actes et leurs pensées, ils sont ou ont été vivants.
Quelle utopie seriez-vous prêt(e) à défendre ?
Pourquoi « seriez-vous » ? Je lutte pour l’humanisme, jusque dans sa traduction politique.
A part être écrivain ou illustrateur, que rêveriez-vous d'être ?
Je ne rêve à rien de cet ordre. Je cherche à être moi le plus authentiquement possible, au sein des autres. Etre écrivain n’est qu’une manière parmi d’autres d’y parvenir en partie.
Où écrivez-vous ? Quel est le lieu qui vous inspire le plus ?
J’écris chez moi, dans mon bureau. J’ai besoin de l’océan pour vivre, mais pas forcément pour écrire. J’écris de l’intérieur.
Quel est le sentiment qui vous habite le plus souvent ?
Face au monde : la révolte. Face à l’océan : l’apaisement. Face à ceux que j’aime : l’amour.
Quel (s) genre(s) de livre(s) vous tombe(nt) des mains ?
Les romans où l’on entend l’auteur écrire et où l’on s’entend lire.
Que redoutiez-vous enfant ?
La haine, la guerre. Comme aujourd’hui.
Vous arrive-t-il de côtoyer des êtres imaginaires ?
Non. Mais des âmes, oui.
Que feriez-vous ou diriez-vous à un ogre s'il vous arrivait d'en croiser un ?
Qu’il cherche en réalité à enfanter et que franchement, il pourrait tenter de s’y prendre autrement. Mais que bon, il nous est bien utile comme ça aussi.
Qu'avez-vous conservé de l'enfance ?
Moi, et la détermination à ne pas mentir aux enfants.
Selon vous, qu'est-ce qui fait vendre un livre ?
L’intérêt du contenu conjugué à l’être et l’écriture de l’auteur, parfois; le marketing, les modes et le conformisme, souvent.
Quel qualificatif vous colle à la peau ?
Si vous voulez dire « comme un chewing-gum à une semelle », c’est : chieur.
Quelle est la meilleure phrase qu'un enfant vous ait dite ?
Outre les mots d’amour de mes enfants, celle-ci : «Moi j’ai le droit d’être là parce que je suis née»
Quelle est votre définition du bonheur ?
Bien trop souvent obligatoire et factice. La plénitude m’intéresse davantage.
Si vous aviez la possibilité de recommencer, que changeriez-vous ?
Envisager cette éventualité ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse c’est ce que je peux effectivement changer de moi, à partir de ce que je suis aujourd’hui. Notre vie est trop courte pour perdre du temps à la réécrire.
Enfant, quel genre de lecteur étiez-vous ?
Un lecteur qui se cherchait.
Vis-à-vis de quoi vous sentez -vous impuissant ?
De la trajectoire de l’Humanité qui court à sa perte. Mais ça ne m’empêche pas pour autant de vivre et de lutter.
Quel est l'animal auquel vous ressemblez le plus ? Pourquoi ?
J’ai laissé l’hippocampe à mon fils, le lézard et le scarabée à mes filles. Je garde la mouette. J’aime le cri de ces oiseaux et leur rapport à l’océan, quand ils se posent sur un rocher à fleur de vagues.
Quel est le mot que vous préférez dans la langue française ?
Papa
Que souhaiteriez-vous que l'on retienne de vous ?
Sincèrement, je m’en fous. Je ne vis pas pour la postérité. De toute façon, ceux qui m’aiment continueront à m’aimer, et mon amour pour eux continuera à les envelopper.
Quelle est votre dernière sortie pour la jeunesse ?
En dehors des rééditions : Julie Capable, illustré par Anne Brouillard, édité par Grasset.
Le(s) livre(s) dans votre production dont vous êtes particulièrement fier ou qui vous laisse(nt) un souvenir particulier
Ceux qui rencontrent l’histoire du lecteur.
Quel est le thème que vous aimez davantage traiter ?
A priori la question du deuil comme énergie de vie réapparaît de manière assez fréquente dans ce que j’écris. Mais je ne traite pas des thèmes : j’écris ce que j’ai à dire.
D'où est né votre premier livre/ illustration ?
De mon ventre d’ogre.
Quel livre en littérature de jeunesse auriez-vous voulu écrire ou réaliser à la place d'un autre ?
Le jour où Franklin mangea le soleil, de Christian Bobin (éd. Le Temps qu’il fait)
Sur quel projet travaillez-vous actuellement ?
L’auto-édition de deux livres, illustrés par Françoise Malaval et que nous imprimons en Inde, où Françoise réside une partie de l’année. C’est un projet de réappropriation de l’acte créatif, de sa diffusion et de sa rémunération... Mais j’expliquerai bientôt tout ça sur mon blog, http://www.thierrylenain.net/
Où et comment vous voyez-vous dans 10 ans ?
Encore plus près de l’essentiel, je l’espère.
Références
Un roman où le personnage, une fille je crois, pouvait devenir invisible, et circulait ainsi dans le monde des adultes. Mais je ne me souviens plus du titre.
Quels sont vos auteurs-illustrateurs de référence ou qui pour vous développent une approche intéressante ?
Celles et ceux dont on perçoit le très grand souci de s’adresser aux enfants. Les autres peuvent m’intéresser aussi, mais d’une autre façon.
Quels sont vos livres "coups de cœur", les "incontournables" en littérature de jeunesse ?
Il n’y a pas d’incontournables. Tout dépend du lecteur.
Un film, une photo/illustration qui vous touche ?
Festen, Gadjo Dilo, In the mood for love, Le diable probablement, Le voyage de Chiiro, L’important c’est d’aimer, et bien d’autres en ce qui concerne les films... S’il faut choisir une photo : un des portraits de Valérie Valère, ou celui d’Iqbal Mashi
Un musicien ?
Un chanteur. Philippe Léotard par exemple.
Un lieu où vous aimeriez vivre
Encore plus près de l’océan
Une phrase (une devise) qui vous guide
« Que c'est abominable d'avoir pour ennemis les rires de l'enfance » (Barbara)
Actualité
Vos dernières (bonnes) lectures ?
Hiroshi creuse un trou, de Tanikawa Shuntarô et Wada Makoto, aux éditions Picquier. La rébellion Zapatiste, de Bashet, chez Flammarion.
Un site (sur les techniques graphiques, un auteur-illustrateur, une approche particulière du texte, de la littérature...) que vous souhaitez recommander ?
La Boîte à Images, d’Alain Korkos
http://laboiteaimages.hautetfort.com/
http://sitedethierrylenain.hautetfort.com/