À bas la lecture !

Il a vraiment l’air d’un sale gosse, ce chaton assis sur la barre du A et brandissant sa pancarte revendicative « A bas la lecture ! » avec sa tortue pour seul public. On est prévenu, l’album va développer les bonnes et mauvaises raisons qu’il a de ne pas aimer lire.

Tout y passe, la taille du livre et celle des lettres, les arguments écologiques – gaspillage de papier- et physiologiques – lettres brouillées en raison de sa vue défaillante…. En énumérant toutes ces raisons, ces prétextes, le « héros » de l’histoire, égrène toutes les causes du désamour de la lecture.

Certaines sont rarement évoquées : sa sœur exemplaire qui lui fait de l’ombre, la survalorisation de la lecture par les adultes, la dévalue lorsqu’il n’arrive pas à bien lire ou encore, la lecture qu’il associe à la mort puisque la majorité des auteurs le sont. L’intérêt de cette revue des obstacles à la lecture tient à la nature des raisons invoquées. Non pas des raisons techniques, du type déchiffrage, et méthodes d’apprentissage, compréhension mais des obstacles liées à la représentation psychique que se construit l’enfant et aux événements négatifs associés. La rivalité avec la sœur se cristallise autour de la lecture, elle lit… elle ! Et on entend les parents dire cela.

Pourtant tout n’est pas perdu. Il avoue aimer lire les menus, ceux de dessert particulièrement et subrepticement, il se laisse prendre au piège de la fiction. Pas celle classique de la littérature de contes de fées mais celle qu’il choisit, une histoire horrible avec des moustaches arrachées.

L’illustration aérée, les personnages expressifs, le trait vif, la mise en page, et la mise en scène donnent bien du charme à cette réflexion à fleuret moucheté entre le héros et les lecteurs : le cheminement entre refus et réconciliation peut enrichir bien des réflexions et aider à affronter la question.