Cueillons les feuilles de thé

Les documentaires adoptent, le plus souvent, un point de vue neutre, extérieur. Ils se centrent sur l’objet ou la notion à découvrir. Yuichi Kasano assume un point de vue très différent dans Cueillons les feuilles de thé puisque c’est au contraire l’affection que le narrateur porte à ses grands-parents qui va prévaloir. Cela permet de suivre le processus selon son regard, d’autant plus impliqué qu’il va vivre, avec les adultes, le travail requis par la culture du thé.

Le jeune héros, un petit garçon non identifié, exprime ouvertement son sentiment. Il dit la difficulté spécifique de chaque étape : choisir les feuilles de thé avant de les cueillir, les sécher à la chaleur, les « pétrir »... Le dialogue énonce ce que le dessin ne peut dire, comme la rapidité du grand-père – acquis de l’expérience – ou la longueur et l’intensité de l’effort demandé. Le petit garçon est d’un grand naturel, fier d’être associé au travail, quoiqu'un peu découragé par l’étendue de ce dernier, effrayé de se trouver nez à nez avec des araignées, déçu jusqu'au découragement de ne pas avoir malaxé suffisamment. L’auteur-illustrateur donne au jeune lecteur tous les éléments nécessaires à la compréhension de la thématique. Il parsème l’image de détails qui attirent la sympathie et informent sur la vie au Japon, loin de tout exotisme. Le dessin très simple, bordé d'une ligne claire ; les expressions très lisibles des personnages (fatigue, plaisir,...) ; l’unité des tonalités (beige, vert tendre, bleu doux) : tout contribue à rendre familier, paisible, le travail de la terre en même temps qu’il rend compte de sa rigueur et de sa rudesse. Un documentaire chaleureux pour chanter le travail qui se cache derrière le thé qu’on boit avec insouciance et permettre une prise de conscience de la réalité à un niveau d’enfant.