Emile il est 7 heures

Le cheveu en bataille, enroulé au creux de sa couette, au milieu de la cuisine, Emile « campe », peu avenant.
Dixième opus de ses aventures, les lecteurs connaissent Emile et la voix de sa mère. Elle l’appelle, « Emile, debout ! il est 7 heures ! » Tout dans le dessin de Ronan Badel nous dit qu’il fait de la résistance : massif, de dos, puis caché sous la couverture, puis se frottant les yeux. Rien dans le ton affectueux de maman ne le convainc « oui mon chéri, il faut te lever, c’est l’heure. » l’humour de l’écriture qui souligne sa difficulté nous entraîne « Emile ouvre les yeux. Ferme les yeux. Ouvre les yeux… Frotte ses yeux. » Sous nos yeux amusés, Emile est notre petit frère, notre cousin, nous-même certains petits matins…
Héroïque, Emile ouvre un œil et se lève. Comme Charlie Brown, Emile est en perpétuel décalage. Décalage horaire, calé sur 7 heures, il vit sa journée à côté des autres, ceux de sa classe qui s’agitent dans leurs activités scolaires et sportives. Décalage affectif, au milieu des enfants qui comptent qui mangent, qui courent, Emile est dans sa bulle même s’il écrit, compte et mange une frite. Seul compagnon, sa lampe, un lapin qui semble compatir muettement. Les adultes présents dans le discours, absents dans le dessin rythment le récit. Ils donnent le tempo et tous les enfants s’y soumettent. Tous ? non, Emile décide du Temps.
« Oh temps ! suspends ton vol ! », impertinente réflexion sur le temps, Emile, émanation complice de Vincent Cuvellier et Ronan Badel, est notre porte-parole, notre étendard. Toujours aussi réjouissant !