En mer

Par le hublot d’un étrange bateau, nous embarquons directement En mer. Pas de personnages, pas vraiment de récit, mais des dévoilements successifs grâce aux rabats qui cachent des scènes ou des paysages inquiétants, un parfum d’aventures. Cette tête de mort blafarde dont les dents mordent l’eau se révèle juste être « quelques rochers qu’il faut savoir éviter ». Nous découvrons alors que le navire qui nous emporte est un beau voilier, un trois-mâts chahuté par la houle, guetté par les monstres marins.

Le texte laisse au lecteur le choix de l’émotion, peur ou bravoure sont une question de points de vue. Peu à peu, la nature du voyage se révèle, on est à bord d’un bateau pirate ou d’un bateau fantôme… De quoi rêver ou s’effrayer.

L’immensité de la mer, la ligne d’horizon sur laquelle se profilent en ombres chinoises les mâts, les silhouettes des hommes d’équipage chapeautés créent une atmosphère sombre et mystérieuse à laquelle contribue le texte qui explique ce qui se passe à bord (« Le bateau n'a pas de nom ni de capitaine ») ou commente les gestes des marins (« Les marins se relayent […] tout le monde touche à tout »). Le ton est grave mais l’humour pointe, on joue à se faire peur.

Bateau fantôme, toutes les composantes d’un récit de pirates sont convoquées : le trésor, les cartes, l’espoir infini et la morale qui préfère la recherche à la trouvaille. « Et, une fois que nous aurons trouvé le trésor, qu’en ferons-nous ? […] Peu importe ». Une balade de charme et de (faux) frissons, un rythme poétique pour le plaisir de croire qu’on pourrait être des pirates.