Lady. Ma vie de chienne

Melvin Burgess s’est taillé depuis longtemps une solide réputation d’auteur dérangeant, et il ne démérite pas avec ce nouveau roman, qui fait partie des premiers titres de Scripto, la nouvelle collection de Gallimard Jeunesse. C’est le moins qu’on puisse dire ! Le résumé de l’intrigue pourrait vous laisser croire à un aimable conte des temps modernes : une adolescente de dix-sept ans est transformée en chienne par un clochard et va découvrir la condition canine dans les rues de Manchester. Mais ce serait sans compter sur ce goût de la provocation cultivé par Melvin Burgess, car en anglais, le titre est encore plus choquant : « chienne » est la traduction de « bitch »...

Sandra, une adolescente délurée dont les moeurs auraient de quoi faire rougir, découvre donc la vie de chienne, en compagnie de deux autres chiens eux aussi canifiés par le même individu. C’est pour elle l’occasion de se poser de sérieuses questions : qu’est-ce qui est préférable, l’humanité ou la canitude ? et surtout, qu’est-ce que signifie « être humain » ? On l’aura compris, Lady est en réalité une allégorie sur le sens de la vie, et là où Melvin Burgess dérange, c’est qu’après y avoir sérieusement réfléchi, Sandra préfèrera rester chienne car elle a trouvé dans sa nouvelle condition tout ce à quoi elle aspirait, et en mieux : une liberté totale, l’ivresse de la chasse et celle de laisser libre cours à ses instincts et à toutes ses pulsions, même les moins avouables, sans se soucier du jugement de quiconque, la vraie vie selon Sandra ! On vous aura prévenu, Melvin Burgess ne s’embarrasse pas du politiquement correct.

Outre ce jugement, ou plutôt cette absence de jugement moral, qui ne laissera personne indifférent, Lady est aussi un roman très drôle, à condition de pouvoir prendre du recul et d’être sensible au goût de Melvin Burgess pour la dérision.