L’Aîné de mes soucis

Thomas, 10 ans, est un petit garçon hypersensible. Sa mère, atteinte d’un cancer du sein, suit une chimiothérapie qui lui a fait perdre tous ses cheveux. Elle porte donc une perruque. Mais, comme la famille habite au bord de la mer (Normandie ou Bretagne), la perruque ne cesse de s’envoler avec le vent ! Le père imagine de multiples solutions : velcro, glu, chewings-gums mâchés, casque à boutons pressions… Rien ne tient ! La mère abandonne et se replie sur elle-même. Le petit Thomas trouve alors une solution imparable : la famille entière, père, mère, Thomas et le petit Félix, se rase les cheveux. La famille « crâne d’œuf » ose alors sortir la tête haute.
Ciné-Roman est une collection originale qui combine un court-métrage en DVD et un roman. Dans le cas présent, le film a été réalisé avant la fiction (en 2003) et a été primé de nombreuses fois. La réalisatrice l’a novellisé en 2005 pour Actes Sud. Je me suis demandé s’il valait mieux lire avant de voir ou voir avant de lire… Et au fond, peu importe, les deux supports étant complémentaires.

Le film ne dure que 10 minutes. On suit la vision de Thomas, qui lance de temps à autre des regards plein d’amour et d’inquiétude à sa mère. Le vif du sujet – trouver une solution pour le problème de cheveux – est traité directement et immédiatement. Tout l’historique du cancer est éludé. Peu de paroles, tout est dans les gestes, les regards : l’implicite est roi dans ce « conte » de Carine Tardieu (elle le présente ainsi). Les images sont fortes, difficiles parfois à supporter (la mère subit des essais un peu barbares…). Au final, une réussite méritée pour ce court-métrage plébiscité par de nombreux scolaires.

Le roman (la nouvelle en fait, de par sa longueur) est beaucoup plus dilaté dans le temps. Le narrateur est toujours Thomas. Sa psychologie est approfondie : il est écologiste dans l’âme, va à l’école, a une petite copine…. Il suit de près la maladie de sa mère, dont on apprend de nombreux détails : opération, prise des médicaments, vomissements dus à la chimiothérapie, perte petit à petit des cheveux… L’écriture de l’auteur est tendre, le lecteur ressent qu’elle maîtrise parfaitement non seulement le sujet (le cancer) mais aussi l’intrigue qu’elle fait évoluer et se développer magistralement en très peu de pages.

J’ai beaucoup aimé à la fois le film et le livre, qui abordent un sujet difficile de façon lucide sans oublier l’espoir, indispensable. Mais L’Aîné de mes soucis ne serait rien sans le talent de la réalisatrice-auteur, que l’on ne peut que saluer.

Espérons que la collection Ciné-Roman, hybride novateur, trouve son public pour continuer à promouvoir à sa manière le court-métrage pour adolescents.