L’Avenir d’Eliane

1923, Blois. Eliane a désormais 14 ans. Elle garde son frère et ses sœurs à la maison, tandis que sa mère continue à travailler sur un bateau-lavoir. Pierre, rencontré à une noce, vient la voir de temps en temps. Lorsque le jeune homme part au service militaire, la mère d’Eliane autorise les deux jeunes gens à s’écrire : c’est le début d’un amour. Eliane aura peur de perdre ce fragile bonheur jusqu’au jour de son mariage.

Troisième et dernier volet de la jeunesse d’Eliane, c’est aussi le plus paisible. Certes, la pauvreté rôde encore et la mère reste meurtrie de la mort de son mari, mais le plus dur est passé. L’intérêt du roman réside alors non pas dans une intrigue pleine de retournements, de drames, mais dans la restitution d’une atmosphère, celle des années 1920. Philippe Barbeau recrée une époque extrêmement rude, aux usages devenus ahurissants, mais aussi beaucoup plus simple. A 15 ans à peine, Eliane envisage son avenir sous la forme d’un mariage, qui plus est d’amour (ce qu’elle considère comme moderne). Elle fait rapidement confiance à Pierre et ne doute pas une fois de sa parole ; si elle craint que le mariage ne se fasse pas, c’est uniquement par superstition au regard des événements passés. Les promis attendront deux ans, se contentant de promenades surveillées et faisant des projets d’enfants. Toujours aussi fine, notre héroïne perd du fort caractère qu’elle avait dans La Guerre d’Eliane et Le Bonheur d’Eliane : Pierre est celui qui prend l’initiative, demande et argumente. Mais la douceur passive de la jeune fille cache la même volonté de s’en sortir, en souvenir des jours heureux où son père était encore vivant. Et un futur qui nous peut nous paraître aujourd’hui réducteur est pour elle la forme ultime de la liberté : Eliane a gagné son bonheur personnel, Philippe Barbeau s’en fait le témoin délicat et juste.