L'énigme de la Vallée-aux-Loups

Après avoir éreinté l'empereur Napoléon Ier dans un article, M. de Chateaubriand s'exile à quelque distance de Paris, à la Vallée-aux-Loups. Le domaine le séduira instantanément. Entre jardinage et bon repas, il écrit, souvent nuitamment, du haut de sa tour dans le parc. De fait, ce qui se passe autour de lui pourrait le concerner peu. Mais voilà que son jardinier et sa femme recueillent un mystérieux enfant, bientôt espionné voire physiquement menacé. On soupçonne alors qu'il pourrait être de sang royal !

Chateaubriand demande la vérité au protecteur du garçon (le valet de pied de Louis XVIII, alors en Angleterre) : le petit Henri serait le fils du duc d'Enghien, et par le jeu des généalogies l'héritier putatif de la couronne. L'homme de lettres met un point d'honneur à protéger Henri et imagine un plan, dont le lecteur sait qu'il finira forcément mal : dans la réalité, nul ne sait si le duc d'Enghien, mort jeune et peut-être assassiné, a eu ou non un enfant. Son existence aurait pu changer le cours de l'histoire de France...

Margot Bruyère brode donc autour de mémoires, de journaux de personnages bien placés à l'époque, et ose une réinvention historique, un roman aux ressorts complexes, qui nécessite bien ses appendices explicatifs. Elle en profite pour nous plonger dans la vie parfois triviale d'un « grand écrivain », et dans un début de siècle brillamment reconstitué, entre menées politiques (voir l'inoxydable Talleyrand) et personnages de petite condition qui ont à peine quitté l'Ancien Régime (les domestiques de Chateaubriand, des villageois...). Le public jeune hors scolaire sera sans doute difficile à trouver, et pourtant l'ouvrage n'a rien de pesamment pédagogique, tout de vivant – simplement d'un autre temps sans téléphones ni avions...