Paris 2050

Paris 2050, almanach d’anticipation, emprunte à son sous-titre le rythme mensuel de ses images. De janvier à décembre, les auteurs distillent des événements de la vie quotidienne des parisiens. La ville existe toujours, avec tous les monuments qui ont fait sa renommée. La tour Eiffel, Notre-Dame, l’Arc de Triomphe, le Luxembourg servent d’arrière-plan aux scènes de la vie moderne : des avocats sirotent leur coca, leur sandwich ou leur pizza devant l’affiche de Victor Hugo qui médite un coca à la main, place des Vosges. Le métro psychédélique ressemble beaucoup au métro actuel mais la station Montparnasse-Bienvenüe accueille des zombies. Au printemps, c’est la ronde de la mode vestimentaire : « raccourcir le long – allonger le court – mettre par-dessus les dessous ». Tous les motifs de la SF et des inquiétudes d'aujourd’hui s’expriment dans l’album. C’est parfois drôle, par exemple, le contrôle social pèse toujours sur les fumeurs qui doivent fumer sous cloche ; parfois un peu lourd, comme la thématique des obèses, des frites et du fast food, ou le cornet de purée ; parfois inquiétant lorsqu'on voit les sectes et les gourous envahir l’espace ! Chaque image très travaillée peut être source de commentaire, amusement mais l’ensemble peine à faire sens dans une cohérence d’album : les images sont soit redondantes avec le texte soit interrogatrices comme l’avion train turbo près des tours jumelles, rappel d’une catastrophe ancienne hors contexte ? De nombreuses images requièrent un décryptage érudit : grands immeubles noirs comme le mégalithe de 2011, l'Odyssée de l’espace ; œil de la télé-réalité qui fait penser à Magritte ou Max Ernst ; oiseaux à l’attaque ; Joconde barbue ; lapin rose de Jeff Koons, étron de Wim Delvoye. Les auteurs-illustrateurs utilisent donc dans le collage une esthétique du bric-à-brac, un surréalisme un peu désuet. Pourtant le récit progresse autour d’indices de fin du monde qui arrive à la toute dernière page de couverture intérieure sous forme de vague ! La continuité narrative habilement dissimulée sous ce stock d’images déferlantes entretient la confusion pour perdre le lecteur. La catastrophe finale, l’apocalypse, rend dérisoires les parisiens si fiers de leur ville. Un album complexe pour lecteurs experts.