Pas assez pour faire une femme

Judith, universitaire de 17 ans, tombe sous le charme de la voix d'Alain, revendicateur engagé.
On est en 1970, deux ans après mai 68. Un très bel amour va naître de cette rencontre faite de découverte des corps, d'échanges littéraires ou politiques. Alain sert de mentor à cette jeune femme inexpérimentée, mais tellement avide de savoir et de liberté. Mais cette passion amoureuse est entachée par le mal-être lié à l'histoire familiale de Judith. Elle plonge dans son passé chaotique et déprimant et prend conscience, petit à petit, de la gravité des actes commis par son père, tyrannique et abuseur.

Avec ce récit écrit comme un journal intime, Jeanne Benameur se livre. Par petites touches, avec un langage métaphorique, elle met des mots sur l'éveil des sens, de la féminité et aussi l'indicible. On est au cœur des choses, au cœur des êtres. L'auteure dissèque pour arriver au squelette.
Fiction ou réalité (l'auteure avait 17 ans en 1970) ? Peu importe, pourvu que l'écrit atteigne sa cible et fasse son chemin. A la fin du récit, on apprend que l'héroïne, au prix d'un grand travail sur elle-même, a gagné sa liberté et son indépendance. « Savoir ne permet pas forcément de se libérer soi-même de tout. Si mon pas est plus ferme aujourd'hui, je sais qu'il me reste encore des portes à ouvrir à l'intérieur de moi. Mais la lourde épave a entamé sa remontée du fond du lac. Un jour, je sais qu'elle sera à l'air libre et que le courant l'emportera loin, vers la mer. Je la suivrai des yeux jusqu'à ce que je la perde de vue. »
Un roman bouleversant de sincérité, fort et émouvant, qui s'adresse plutôt aux adultes.