Tarja

Tarja, seize ans, collégienne genevoise, cultivée et étonnamment fascinée par Einstein, attend un enfant. Normal, dit la rumeur facebook, « c’est une salope ». « J’ai fini par le croire, car la majorité n’a jamais tort ». Ainsi commence le vigoureux roman de JNSciarini. Très vite, nous apprenons que le « père » de l’enfant est un professeur du collège, Bastien C.
Pour Tarja, fille d’un très respecté inspecteur de l’Instruction et d’une mère un peu falote mais aimante, la révélation de la grossesse se fait entre tension et compréhension, dans le contexte étouffant et violent de lycées où, les adolescents entre eux ne se font pas de cadeau. Le père éloigne Tarja à Berne où, pendant les vacances, la tendresse de sa tante, la chaleur d’un chauffeur de taxi, les contacts affectueux de Léon, l’ami sûr, le geek, expert en bouddhisme et en informatique, lui permettent de vivre sa grossesse avec une relative sérénité même si d’accident en rechute, nous éprouvons son itinéraire moral, physique comme un chemin de croix. De la mort, titre du premier chapitre, à la naissance, titre du dernier, nous suivons Tarja de l’abattement total à la rédemption dès lors qu’elle prend la décision de garder cet enfant. La débâcle morale dans laquelle se trouve l’adolescente la conduit au bord du suicide. Entre Eros et Thanatos, le roman hésite puis s’équilibre dans le flux verbal du ce long monologue intérieur, tout juste interrompu par quelques notices de facebook ou quelques échanges épistolaires entre Léon, et Tarja. La complexité des caractères, la variété des personnages, les tâtonnements des héros, les références littéraires, musicales, l’écriture courte, haletante qui fait image construisent un roman écorché vif à l’image de Tarja, parfois poétique, parfois cru en prise directe avec le monde contemporain. Un grand roman pour être ému, palpiter, aider à grandir.