Toute la douceur du monde

Lola, petite boute-en-train de sept ans, est passionnée de dessin, elle adore ça. Cette passion, elle la tient de sa maman. Désormais adulte et chirurgienne infantile de métier, sa maman prend des cours du soir pour se remettre au dessin, mais elle est vite découragée et ses ébauches en font les frais : elle les déchire et les jette à la poubelle. Lola n’est pas de cet avis et récupère les créations de sa maman, qu’elle tente de reconstituer. Chez sa mamie, Lola découvre les dessins d’enfant de sa maman, notamment le dernier qu’elle a réalisé (au même âge qu’elle), mais qui reste inachevé à la surprise de la jeune fille. C’est au détour d’une conversation avec sa mamie que Lola en apprend plus sur son défunt grand-père – qu’elle n’a jamais connu – et notamment ses accès de colère et de violence. Déterminée à aider sa maman, Lola l’encourage à poursuivre ses productions artistiques et a même l’idée de monter une exposition de leurs dessins, chez elles, et ce n’est pas une blessure au bras qui arrêtera la jeune fille ! Lola et sa maman, complices, connaissent un grand succès auprès de leurs invités.

Dans ce roman court pour jeunes lecteur·rice·s, Didier Lévy narre l’affection et la tendresse de cette relation mère-fille et leur passion commune pour le dessin. L’écriture s’élabore à hauteur d’enfant, dans les yeux de Lola : simple, direct, parfois ironique, le récit évolue et s’émeut selon la perspective de la jeune fille. Au détour d’un grand-père violent, d’une grand-mère meurtrie et d’une mère blessée, en plus de l’absence d’un père « super-héros » qui a privilégié sa carrière au détriment de sa propre famille, la jeune artiste dégage une force de caractère, une belle maturité pour son âge et une énergie positive qui vainquent le passé douloureux. Lola, clairvoyante, demande à sa mère : « – C’est pour ça que tu as voulu réparer les enfants, après ? », en regard de son enfance traumatique, ce que sa mère confirme. La jeune fille, profondément admirative de sa mère, tâche de lui redonner le goût du dessin et l’invite à terminer le dessin interrompu avec brutalité à l’époque : un bel acte de résilience. Les illustrations de Sibylle Delacroix sont plutôt monochromes, mais un élément ci et là est coloré, souvent en rouge et rarement en bleu. Ainsi, les lèvres de maman, l’armoire du grenier, la veste de Lola, ou encore les lunettes de mamie ressortent page après page et illuminent la tendance sépia et nostalgique des dessins qui accompagnent merveilleusement bien ce roman.

Cet ouvrage célèbre avec force l’amour familial et la résilience, un très beau message d’espoir et de détermination qui vaut la peine d’être partagé et lu, autant seul·e qu’à plusieurs !