Un pas puis mille

Comme un explorateur qui tient son cap et nous montre la terre promise, un petit garçon souriant accueille le lecteur. « Un pas puis mille», l’aventure c’est aussi simple que cela. Une décision, un pas, puis d’autres, le pas assuré et léger. Les traces dans le paysage blanc, le bonnet à oreillettes nous disent qu’on est dans un pays froid. Les larmes glaçons le confirment. Les détails, espaces vastes et immaculés, les sauts de rocher en rocher, la pêche difficile relatent la saga d’un fier trappeur.

Le récit à la première personne affirme une volonté de libération où les autres ne sont que des empêcheurs de danser en rond. L’enfant crie sa rancune à l’égard des adultes et la nature accueillante au visage de femme le console des décisions arbitraires. Petit à petit se dessinent les difficultés qui l’assaillent et les raisons de sa fugue. Le discours intérieur qu’il déroule nous confie ses peurs. L’illustration envahit l’image de faux bruits tandis que le petit garçon se ratatine littéralement de peur, de froid, de faim. Le héros va connaître son moment de faiblesse et s’inventer un compagnon d’infortune, Pesco, poisson, bâton, serpent avec qui il va surmonter les obstacles de la route et ceux que les adultes lui imposent.

Cet album qui raconte une crise liée au déménagement des parents est très finement écrit, texte comme images. On suit l’enfant avec sympathie, on comprend sa révolte et les illustrations colorées en bouquets sont lumineuses dans les moments d’élan, sombres et sinueuses lorsque le doute s’installe. Texte et images se confortent pour rendre sensible le tourment du narrateur qui nous enrôle dans sa révolte, sa peur, et pour finir son bonheur. Un album riche et subtil sur une de ces ruptures que vivent parfois les enfants.