Un renard : un livre à compter haletant

Oh qu’il a l’air futé, ce renard au nez levé ! Peut-être médite-t-il un mauvais coup ? Vers où ses pas le mènent-ils ? 

La situation se précise. « 1 Un renard affamé » : couché en rond, l'animal attire la sympathie, voire la compassion ; « 2 Deux yeux rusés » : tapi, le regard aiguisé, le renard devient beaucoup plus inquiétant… On comprend alors le sous-titre de l’album, « un livre à compter haletant ». Nous allons donc poursuivre. « 3 Trois poules dodues » : elles cherchent un ver, prises dans le mouvement, affairées, elles occupent l’espace de la page, insouciantes et élégantes. « 4 Quatre pattes de velours » : on ne voit que le bout des pattes, noires, le long d’un grillage…

Kate Read joue formidablement sa partie, elle isole chaque fois le détail pertinent, elle alterne une page pour le renard, une page pour le poulailler et on s'inquiète pour les trois poules bienheureuses couvant « 5 Cinq œufs bien au chaud ». L’illustration fait éclater les couleurs rousses du renard, collage et peinture créent des effets de matière, le mouvement ample de la queue s’enroule autour du poulailler et  prouve la ruse du renard qui avance ; « 6 Six pas silencieux »… Qui va gagner ? Le suspense s’installe, « 8 Huit petits yeux ronds » s’affrontent dans le noir. Le final est une merveille de couleurs, d’élans et de malice. Futé, le renard ?

Les livres à compter, tout comme les abécédaires, rivalisent d’invention pour construire chez les enfants une éducation de base. Celui-ci, outre la découverte des chiffres, introduit les enfants dans les structures prototypiques du récit : seul contre tous ; fort et faibles ; progression et retournement de situation ; ancrage culturel des personnages, le renard comme les poules ont une histoire littéraire. Un album vivant, joyeux, riche, à lire et relire même si on sait déjà compter jusqu'à 10.