D'ici là, un genre d'utopie

En 2041, Sacha fait partie d'une troupe de spectacle vivant, la Compagnie. La jeune fille aime Adriana, mais leurs proches soulignent leurs différences sociales. Un peu plus tard, lors de la Grande Parade du Genre, une Horde de motards à la solde du pouvoir attaque la Compagnie. Sacha a repéré un des membres de la Horde, Devil, et lui a volé son bracelet régulateur hormonal trans-cutané. Devil est en effet un homme cyborg, mais devient femme sans traitement, et nourrit son système immunitaire de cellules-souches de singes. Auprès de lui, Sacha déteste et apprend aussi. Et puis la vie continue : « on ne veut bien que ce que l'on imagine richement », comme l'écrivait déjà Gaston Bachelard.

Le sens général de l'intrigue s'invente plus qu'il ne se comprend. Christian Bruel construit des petites scènes aux mêmes personnages et aux thématiques sociétales proches dans un grand tout, mais il ne fait que suggérer des actions : une séparation, un affrontement… L'image de Katy Couprie accompagne et signifie également, même si plusieurs interprétations sont toujours possibles. Le résultat évidemment très perturbant nous pousse à réfléchir sur nos avenirs.

La forme du livre détonne encore : un ouvrage solide et soigné, des illustrations aux couleurs fortes, un quadrillage qui donne un aspect flouté. Nous voyons des silhouettes (exagérées), des dégradés de couleurs… L'idée générale pourrait être celle d'un écran informatique brouillé, pixellisé. Le texte est encapsulé dans le contour d'une icône de dossier, de même que des petits échanges : définitions, sms, notules, etc. L'ensemble concourt à rendre un monde de demain connecté, où l'on saute d'une proposition à l'autre. D'ellipses déroutantes en présentation outrée, ne se classe pas, il se pense. Pas très facilement.