Luna Viva

Luna Fournez, jeune fille blonde aux yeux bleus, cache bien son métier : avec perruque, fond de teint, roulotte et falbalas, elle devient une voyante, soigneusement surveillée par son frère aîné Gidy et les forains de la famille Falcone. Accablé de dettes de jeu, poursuivi par les Falcone, l’autoritaire Gidy oblige sa sœur à participer à un tournoi de voyantes. Izabella, cartomancienne expérimentée et sœur de Falcone, est chargée d’entraîner Luna. D’abord circonspecte, la jeune fille finit par adopter l’esprit de compétition, d’autant qu’elle apprend à se connaître et à accepter son authentique don de voyance.

Tout commence tristement, par une tentative de suicide ratée. Luna, orpheline de mère, harcelée y compris sexuellement par son frère, insatisfaite d’un travail pour lequel elle se sent hypocrite, n’a même pas pu se raccrocher à l’amour qu’elle porte à son chien Sagittaire. Mais l’intrigue rebondit très vite, sur ce fameux tournoi de voyantes. Ce dernier se déroule comme n’importe quel concours, avec des épreuves éliminatoires, des chausse-trapes et des traîtrises, entre lesquelles l’héroïne et narratrice navigue innocemment.

Le ton alerte, les personnages follement originaux et soignés, les incursions à la lisière du fantastique emportent complètement le lecteur. Aurélie Benattar fait virevolter son histoire entre la comédie, le doux délire, le drame aussi car Gidy parvient à nous faire vraiment peur à travers les pages et les mots. Seule la menace du Cercle de forains contre l’influence des voyants reste un peu abstraite, même si elle est brillamment résumée sous la formule « une histoire de gros sous ».

Avec son prénom exotique et son nom de tous les jours, Luna concilie peu à peu les contraires et nous touche à la façon d’une vraie « dame de cœur ». Trop tôt jetée dans l’arène des adultes, c’est une adolescente à la recherche de son identité, de son avenir.

Un ouvrage singulier et réussi, incarné jusque dans les titres de chapitres : des cartes de tarot et leurs significations possibles…