L'étranger sur le sable

Ness vit sur l’île de Dunnett, complètement coupée du monde, depuis la catastrophe qui a empoisonné la mer. Les habitants de l’île vivent en autarcie complète, dirigés par un Grand Conseil rigide et implacable, qui refuse toute modernité, tout ce qui vient de la mer et du passé. Les livres y sont bannis, on brûle ceux qui restent le Jour de la Purification. Pour survivre et se nourrir, il faut travailler la terre et élever du bétail. La jeune fille a perdu ses parents et vit avec son frère Ty chez son oncle Marn, sa cousine Sophie, et la deuxième femme de Marn, Tilda, une personne revêche, désagréable, dure, qui fait trimer sa famille du matin au soir.
Ness rêve d’autre chose et se rappelle les histoires que son père lui lisait autrefois dans les livres et la douceur de sa mère disparue.
Un jour d’hiver, les trois enfants partent ramasser de jeunes pousses dans le sol encore gelé et vont jusqu’à Skellap Bay, un endroit désert et sauvage que Ness aime particulièrement. Ils trouvent sur le sable un homme inconscient et blessé. C’est un étranger qui gît là, que la mer a rejeté. Ness décide de le cacher dans un recoin de falaise et de le soigner, malgré les réticences de sa cousine. Elle enfreint là une loi implacable du Conseil et sait qu’elle risque gros. Lorsqu’elle peut échapper aux innombrables corvées et à la vigilance des adultes, elle se rend à Skellap Bay pour nourrir et soigner l’homme. Peu à peu, celui-ci reprend vit, apprend à Ness qu’il se nomme Dev, qu’il vient du continent pour une mission d’évaluation de l’environnement. Ness ne pense plus qu’à cela : retrouver Dev et quitter l’île avec lui, pour échapper à sa triste réalité. Mais elle doit affronter les autres, les suspicions, les superstitions, ceux qui l’épient et finissent par connaître son secret.
Anna Mackenzie nous offre un magnifique roman, dans la lignée de ceux de Lorris Lowry, un texte d’anticipation dont l’action se situe dans un monde bouleversé par la folie des hommes et la rupture de l’équilibre écologique. Elle montre finement les réactions excessives de ces îliens, repliés sur eux-mêmes et sur des convictions si fortes qu’elles en deviennent un carcan et une tyrannie, où l’étranger est le diable qu’il faut éradiquer à tout prix. Le combat de la jeune héroïne est d’autant plus fort et touchant, qui lutte pour un avenir meilleur qui ne peut, hélas, qu’être individuel. Elle ne peut pas changer le monde dans lequel elle étouffe et choisit d’aller en découvrir un autre. Une réflexion intelligente t passionnante sur l’intolérance et la soif de liberté, porté par un personnage féminin très émouvant.