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Giovanna Zoboli

Julie Puddu
8 juin 2010

Giovanna Zoboli vit et travaille à Milan, où elle est née en 1962.

Elle a commencé par écrire pour les adolescents aux éditions Mondatori sous le pseudonyme de Giulia Goy. Elle a collaboré avec de nombreuses maisons d’éditions en tant que rédactrice, éditrice, et chargée de communication éditoriale. Ses poèmes, histoires et romans sont publiés en Italie et à l’étranger. Fondatrice en 1998 de « I libri a naso »en collaboration avec Guido Scarabottolo et Paolo Cantone, elle a créé avec ce dernier la maison d’édition Topipittori 4 ans plus tard.

Ses livres ont été récompensés par de nombreux prix entre 2004 et 2008 : le White Ravens, le prix Andersen et le Comicon Micheluzzi. Elle a donné des cours sur le thème de la parole et l’image dans les livres illustrés en 2005 à l’académie Drosselmeier de Bologne.

Cette lectrice assidue a puisé son inspiration dans les contes traditionnels : le Petit Prince, Pinocchio, Alice aux pays des merveilles... Elle a été influencée par beaucoup d’écrivains, parmi les plus grands auteurs jeunesse : nous pouvons citer Bruno Munari, Leo Lionni et l’américain Maurice Sendak. Ses livres ont un style enjoué et poétique, les animaux y ont une place capitale. Il y a dans ses albums une véritable intention pédagogique surtout ceux ayant pour thème l’école, la cuisine ou les questionnements enfantins.





Propos recueillis par Julie PUDDU, licence professionnelle métiers de l’édition et du commerce du livre de l’IUT Paris Descartes.

- Vos albums sont empreints de philosophie et de conseils pour la vie quotidienne, notamment les livres évoquant la rentrée des classes ou la cuisine.

Y-a-t-il un message global qui parcourt les pages, ou vos livres naissent-ils principalement du plaisir de raconter des histoires ?



En fait, l’idée du message est secondaire. En ce qui me concerne, les éléments fondateurs de mes histoires sont aléatoires, ce sont des idées que j’ai perçues à travers mille situations, mon attention capte ces repères par hasard. Il y évidemment dans ces éléments quelque chose me concernant, m’intriguant. Même lorsque j’ai construit une histoire sur un thème pour répondre à une demande particulière, j’ai cherché à m’approprier l’idée, mettre en valeur le sujet avec ma propre écriture. Les livres sur l’école, précisément, entrent dans des faits autobiographiques.


Le livre sur la rentrée des classes reflète donc des problèmes que j’ai vécus. Tous les écoliers n’en ont pas forcément, mais il y en a qui en ont eu et d’autres qui en auront. Ces livres sont pour eux.



- Les animaux sont très présents, c’est à travers leur voix que le lecteur découvre l’histoire. Ont-ils un poids plus important dans l’imagination des enfants, un pouvoir d’enchantement sur les albums ?


C’était ma grande passion ! Jusqu’à un certain âge, le monde des animaux était celui qui me fascinait le plus, avec son aspect scientifique : comment ils vivaient, leur activité...Le lien symbolique avec l’imaginaire est très présent. Il y a également une grande tradition littéraire : un mélange d’histoires enchantées, fables, contes. J’apprécie ces histoires classiques et ces grands fondateurs, comme Jean de la Fontaine ou Esope.




- Les protagonistes de « Mondocane» et «Boris » sont des chiens. Ces deux histoires offrent une vision du monde différente, les enfants changent peut-être de regard sur les animaux domestiques après cette lecture.

Comment expliquez-vous ce choix, les chiens ont-ils un rôle particulier en tant que narrateurs ?



Ces deux livres sont très différents. Boris est un personnage humoristique, crée par la dessinatrice Francesca Bazzuro. J’ai construit une histoire courte pour cette race canine proche du bouledogue. C’est l’éditeur qui a été le pilier de ce projet mettant en scène un chien classique, de luxe .J’ai donc imaginé un chien « riche », comique, celui d’un antiquaire. Il décrit tous les beaux objets de la boutique, ce monde dont il fait finalement partie. L’aspect comique vient du fait qu’il appartient au commerçant, il est en quelque sorte à son service.

Mondocane est au contraire un personnage peu sûr de lui, c’est un bâtard. Il est convaincu d’avoir été abandonné, et passe des vacances sans ses maîtres. Avec de la distance il découvre qu’il est capable de faire un tas de choses dont il ignorait l’existence.

C’est une expérience vécue similaire à celle de l’école.




- Votre livre, « L’ange des chaussures » (publiés aux éditions Notari en octobre 2009), développe des thèmes existentiels à travers la rencontre d’un enfant et un ange. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l’inspiration et l’écriture de cette histoire ?


C’est certainement le livre le plus « anormal »de ma production : il est très long et n’a pas cette tonalité humoristique qu’ont les autres livres, ce coté amusant. Il est plus sérieux.

Dans un sens, ce livre me reflète. Il m’appartient surtout par sa réflexion sur l’enfance, je décris la condition infantile souvent ignorée des adultes.

Dans ce livre, le père est un personnage capital, l’expression du pouvoir. Ce qui m’a intéressé a été le fait de mettre en valeur la distance entre ces deux mondes. L’accentuer afin de faire prendre conscience qu’elle existe partout, quel que soit le pays ou la classe sociale.

Les adultes ont quelquefois une totale méconnaissance des enfants qu’ils ont sous les yeux.

Cet enfant ignore être considéré comme un « clone » de son père. Il est en dépression, le manque de relations est la pire chose qui puisse arriver à un enfant. Nous ne nous rendons pas compte que les enfants occidentaux vivent parfois dans des conditions de solitude dramatique.

La figure de l’ange souligne cette disproportion. Il n’y a là aucune référence religieuse, c’est une présence invisible, surnaturelle, que cet enfant est en mesure de percevoir.

Le père, en revanche, est un fabriquant de chaussures très pragmatique, et ne perçoit qu’une seule chose de l’ange: l’absence de chaussures.




- Vous avez effectué une étude sur le rapport entre paroles et images. En ce qui concerne vos histoires, comment s’organise la conception de l’ouvrage ?


J’ai effectivement dispensé un cours sur ce thème pendant 4 ans. Cette réflexion est née de mon statut d’auteur. Ma maison d’édition (Topipittori) fait des livres illustrés, c’est une expérience très enrichissante de travailler sur les livres des autres. Faire partie du dialogue entre auteurs et illustrateurs m’a réellement ouvert l’esprit, cela fait voir les choses sous un autre angle. Je suis maintenant parvenue à considérer mes livres comme appartenant non pas à ma personne mais à la maison d’édition. Je n’ai plus ce lien unique avec mes livres, cette distance me permet d’être plus objective, prendre conscience des atouts et des faiblesses. L’activité d’éditrice me plait énormément, c’est un travail de fond intéressant.




- Comment se passe la collaboration avec les illustrateurs : vous les conseillez ou leur faites entière confiance ? Avez-vous une préférence pour un type d’illustrations ?


Cette année, grâce au travail éditorial, je suis entré en contact avec beaucoup d’illustrateurs. Certains d’entre eux me touchent, lorsque leur univers me plait j’écris des textes en pensant déjà aux dessins. Je construis l’histoire en quelque sorte en amont, en imaginant leurs illustrations. J’ai eu la chance de connaître beaucoup de ces artistes et ainsi voir leur atelier, suivre l’évolution de leur travail. Je sais donc à quoi m’attendre et je peux ainsi chercher un aspect du livre à développer avec eux.

Je n’ai pas de types de dessins préférés, mais il m’est arrivé de ne pas être touchée par des grands illustrateurs. Il y en a énormément de très bons, mais qui ne m’ont pas émue : malgré leur talent leur univers ne colle pas toujours à mes dessins. En revanche, il arrive que je sois littéralement séduite par un univers imagé, je sens qu’il y a une harmonie, un lien fort qui me donne envie de travailler avec eux.

Je laisse beaucoup de liberté dans le processus créatif, car une fois que je l’ai choisi je respecte le travail de l’illustrateur. Cela peut aboutir à de grandes surprises, il est intéressant de les laisser libres dans la lecture et l’interprétation du texte, sans trop de conseils. Je peux donner éventuellement donner quelques indications générales si on me le demande.

Je suis plus directive en tant qu’éditrice, car nous travaillons souvent avec des personnes très jeunes, qui travaillent sur leur premier livre. Ils ont peu d’expérience, il faut donc les guider, leur expliquer pourquoi tel point fonctionne ou non.




Pour aller plus loin

Bibliographie :


« Alla conquista del passato «, Giulia Goy et Massimo Scotti, Mondadori, 1994

« Per favore non vestirti di idraulico », Giulia Goy, Mondadori, Le ragazzine, 1999

« Maleducata, io ? »Mondadori, Giulia Goy, Le ragazzine, 2001

« Mondocane », Giovanna Zoboli et Francesca Bazzuro, Topipittori, 2004,

Edition francaise : « Mondocane », La Joie de Lire, 2004

« Zoo segreto », Giovanna Zoboli et Francesco Bazzuro, Topipittori, 2004

« Filastrocca ventosa per bambini con fiato corto », Giovanna Zoboli et Simona Mulazzani, Topipittori, 2004

« Che mistero nasconde il giardino dei vicini ? »Giulia Goy et Julia Binfield, Topipittori, 2005

« Dovunque tu sia, caro cocodrillo », Giovanna Zoboli et Francesca Bazzuro, Topipittori, 2005

« Di notte sulle notte di strada »Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo, Topipittori, 2005

Edition francaise : « Questions dans la Nuit », La Joie de Lire ,2005

« Boris », Giovanna Zoboli et Francesca Bazzuro, Topipittori, 2005

Edition française : « Boris » La Joie de Lire, 2005

« Anselmo va a scuola », Giovanna Zoboli et Simona Mulazzani, Topipittori, 2005

« Una vita », Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo, Ugo Guanda, Altre fenici, 2005

Edition française : « Notre premier jour d’école, Autrement jeunesse, 2006

« Filastrocca acqua e sapone per bambini con piedi sporchi », Giovanna Zoboli et Maja Celija, Topipittori, 2005

Edition française : « Eau et savon pour enfants aux pieds sales », La Joie de Lire, 2006

« Il libro delle Torte », Giovanna Zoboli et Francesca Ghermandi, Topipittori, 2006

« A scuola, principessa ! », Giovanna Zoboli et Gabriella Giandelli, Topipittori, 2006

« Due scimmie in cucina », Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo, Topipittori, 2006

Edition française : « Deux singes dans une cuisine », La Joie de Lire ,2006

« Al supermercato degli animali », Giovanna Zoboli, Simano Mulazzani, Topipittori, 2007

Edition française : « Au supermarché des animaux, Circonflexe, collection Albums, 2008

« C’era un ramo », Giovanna et Francesca Zoboli, Topipittori, 2007

« Non crede alle sirene », Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo, I libri a naso, 2007

« L’angelo delle scarpe », Giovanna Zoboli et Joanna Concejo, Topipittori, 2009

Edition francaise : « L’ange des chaussures », Notari, 2009

Sites web :

www.topipittori.it

Site de la maison d’édition dont elle est fondatrice, il recense tous les livres publiés depuis sa création ainsi qu’une petite biographie des auteurs et l’illustrateur .Un lien est consacré à l’histoire de la maison.

Autres sources :
www.ricochet-jeunes.org
www.filidaquilone.it
www.leggereleggerci.it
www.whipart.it
www.messageinabook.com
www.costanzaolazzo.blogspot.com


Photo Sommaire © Giovanna Zoboli

Auteurs et illustrateurs en lien avec l'interview

Illustration d'auteur

Giovanna Zoboli

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