Sans proposer de sommaire, ni d’index, la collection Philophile ! encourage la lecture volontaire : ni plus ni moins, il faut se plonger dans l’ouvrage pour en connaître le détail. C’est ainsi que ce titre en particulier, sur l’expérience, est une jolie façon d’entrer en philosophie, de s’essayer à la réflexion. Carole Widmaier propose au lecteur d’envisager le sujet à partir des différents sens que lui confère l’usage. Il n’y a pas l’Expérience, point. Mais l’expérience est accumulation de compétences. « C’est en forgeant qu’on devient forgeron » est la devise d’entrée en matière, et petit à petit l’auteure déroule la spirale du sens : en forgeant – c’est-à-dire en pratiquant –, mais aussi en essayant, en expérimentant, tout adolescent construit son identité à partir de ses propres questionnements. L’expérience est aussi accumulation de connaissances.

Mais toute expérimentation ne se conclut pas par un succès. Quel est le rôle de l’erreur par exemple ? Dans le cas d’une expérience scientifique, c’est l’élimination des erreurs, ou obstacles, qui permet d’avancer. Si celle-ci est guidée par un motif idéologique, l’erreur est-elle envisageable ? Apprend-t-on pareillement de ces deux formes d’expérience ?

L’expérience n’est pas toujours volontaire, souvent même elle est subie. Qu’en est-il alors des « leçons de l’expérience » ? Et quel est le statut de l’expérience collective dans la vie sociale ? Dans la mémoire collective ?

Expérience, expérimentation, construction de l’identité : voilà le chemin proposé à la réflexion du lecteur par Carole Widmaier. Dans une langue accessible, l’enchaînement de la pensée est clairement exposé, le lecteur est stimulé par la logique du raisonnement. Judicieusement illustré par Alfred, qui expérimente la suggestion par le dessin humoristique, ponctué de quelques citations d’illustres expérimentateurs de la pensée, réutilisables dans un devoir, ce tout petit ouvrage a beaucoup d’atouts. Il est la démonstration que la philosophie se lit, car elle est d’abord réflexion, et par là même accessible à celui qui le souhaite. L’expérience des autres servira de point de comparaison pour construire la sienne. Un titre à suggérer absolument.

Véronique Cavallasca

Présentation par l'éditeur

Toute expérience, quelle qu'elle soit (une brûlure, une passion, un voyage, une naissance ou une mort) nous modifie. Si l'on apprend sur soi, sur les autres, sur le monde, c'est bien toujours un je qui apprend, jamais un nous. Mais le sens même d'une expérience suppose d'envisager son possible partage. Chacun de nous apprend de sa propre expérience et de celle des autres, mais toutes ces expériences ne méritent ce nom que si elles s'inscrivent dans l'horizon d'un nous...