Mulu

Il était une fois, il y a bien longtemps, avant la maîtrise du feu, dans une tribu préhistorique, Mulu, un petit garçon que la chasse n’intéressait guère, contrairement à ses compagnons. Mulu rêvait sur le bord de la falaise ou près de la rivière et prenait plaisir à se réfugier dans une grotte qu’il partageait avec l’ours qui y vivait ; un bel ours, massif, rond, paisible. Mais surtout Mulu aimait peindre sur les murs de la grotte.

Un jour d’orage, Mulu trouve refuge dans la grotte mais les éléments se déchaînent et Mulu prend peur. L’ours, lui, ne bronche pas, il dort. On assiste, amusé, aux efforts faits par le minuscule Mulu pour tirer le plantigrade de son sommeil. Nathalie Minne illustre la fragilité du héros et la placidité de l’animal. Elle rend sensible l’agitation de l’un face à la confiance de l’autre et le sentiment de calme qui domine s’oppose à la description apocalyptique de la fureur des éléments extérieurs. Lorsque la foudre entre dans l’abri, seul l’ours peut l’affronter. L’enfant lui donne une sorte de baguette magique, le bâton avec lequel il dessine et à l’extrémité, surgit le feu. Ainsi apparaît le précieux feu !

On pense ainsi être dans un conte d’origine, mais « Mulu vit dans les yeux de son ami ce que les hommes feraient de son feu »… et Mulu éteint le feu ! Ce thème de la dérive du progrès, ce choix assumé de préférer l’amitié au bénéfice immédiat et de cacher sa découverte apporte une note originale dans le récit et conforte le caractère singulier de Mulu. Les illustrations, dans une jolie atmosphère grise où le l’homme et l’animal vivent heureux, expriment la force et le bien-être de ce partage. On trouve dans cet album le thème ancien de l’intercompréhension entre homme et animal, celui d’une unité profonde, d’avant l’histoire, d’avant l’écriture et Alexandre Chardin raconte à sa façon l’apparition du dessin dans les grottes. Des personnages attachants dans une ambiance de paradis perdu.