A comme Afrique

Sur la couverture toilée, trois masques, trois toits de paille, un décor fleuri et le titre en relief, A comme Afrique, donnent le ton : nous sommes invités à rencontrer un continent grâce à un abécédaire. Les articles de cet abécédaire – de A comme Ancêtres, jusqu’à Z comme Zèbre – tracent un portrait de ce territoire immense, divers et mêlent des objets concrets, familiers, utilitaires (Calebasse, Dattes, Kola) et des notions abstraites, délicates (Entraide, Initiation. Marché, Proverbe, Village). Ils dessinent des sociétés traditionnelles fondées sur les Marché, Proverbe, Village, Question, Rire, Sagesse.

D’un article à l’autre, Kouam Tawa construit pas à pas un continent vénérable, un parti-pris d’Afrique rêvée, loin des réalités actuelles de l’Afrique vitaminée, populaire, citadine. Subtilement, il introduit une clé de l’évolution entre hier et aujourd’hui, celle du temps et des relations adulte/enfant. À l'entrée Question, il écrit : « Grandir était naguère une leçon de patience ». Avant de  conclure : « Il m’a fallu vingt ans, disait le vieux Nônô, je dis vingt ans et pas vingt jours, pour savoir comment on vient au monde ». Cette accélération du temps repose sur une relation au monde bouleversée et sur un mode de construction des savoirs chamboulé, « le jeune prenait le temps d’ouvrir les yeux, d’ouvrir les oreilles pour trouver de lui-même réponses à ses questions. L’adulte ne parlait qu’après une quête vaine ». Nostalgie ou non, l’auteur raconte les paroles au cœur des oasis ou des villages, les chuchotements du soir et des fêtes de famille…

Outre cette analyse personnelle de Kouam Tawa, A comme Afrique s’enrichit de l’illustration de William Wilson à la fois austère et drôle. Austère car chaque lettre de l’alphabet se détache, énorme sur un fond neutre, uni ; drôle parce qu’il a découpé les lettrines dans des tissus africains colorés, détournés de leur utilisation première.

Les auteurs construisent ainsi une encyclopédie originale de l’Afrique, complétée de façon éclairante par un dossier documentaire sur le continent africain, les langues ou quelques précisions ponctuelles qui enrichissent les notices alphabétiques. Le lecteur, quel que soit son âge ou sa connaissance de l’Afrique, est invité à musarder. D’une lettre à l’autre, les auteurs tracent une scène, ouvrent des portes et donnent envie d’en savoir plus. Un abécédaire séduisant.