Trois sœurs

Trois sœurs, liées par l’absence de structure familiale solide, assurent leur survie grâce à une relation fusionnelle, entre elles et avec la nature qui les protège. Une imagination fertile et une propension à l’illusion fantasmagorique leur permet de créer autour d’elles une atmosphère singulière, obscure, à la fois menaçante pour autrui, et réconfortante pour elles.

Le texte de Stéphane Servant est rythmé par cette noirceur lumineuse, écrit comme un poème en prose avec des phrases minimalistes et une répétition des mêmes mots augmentés d’une nuance. Les images qui naissent de ces mots sont fortes, volontairement choquantes. C’est pour moi un récit d’adolescence, qui doit trouver son public, et la joliesse du trait de Lisa Zordan joue sur le contraste et fait opérer le charme. Ses illustrations en noir et blanc immergent le lecteur dans cette atmosphère, remplie d’évocations oniriques en plans rapprochés surréalistes, ou en gros plans suggestifs, menaçants ou très émouvants. Conserver la tonalité violacée de la couverture leur aurait donné encore plus de force, mais les flots tourmentés des contreplats sont annonciateurs : ces trois sœurs-là ne laisseront pas le lecteur indifférent.