Pierre et le loup

Dans cette nouvelle édition de l’œuvre de Serge Prokofiev, on est immédiatement séduit par la version cartonnée de la couverture, qui la destine aux tout petits enfants, avec la photo de groupe imaginée par l’artiste plasticienne Lili la baleine, pleine de douceur et de malice. Preuve que le délicieux frisson que procure ce conte divertissant, un brin moralisateur, pour la forme, mais surtout ode à la musique et à l’enfance, n’est pas réservé aux grands !

Cette balade initiatique parmi les instruments de l’orchestre, interprétée par l’Orchestre national des Pays de la Loire, dirigé par Pascal Rophé, est un enchantement. Chaque instrument sert l’identification des personnages du conte, grâce à son timbre particulier, véritable entraînement à l’écoute active : les cordes prêtent leur finesse et leur dynamisme au caractère de Pierre, l’enfant frondeur qui n’hésite pas à braver le danger, le son nasillard et rond du hautbois sert à merveille les dandinements du canard, quand la flûte traversière illustre l’oiseau sautillant et virevoltant. Pour la figure du loup prédateur, les trois cors résonnent et vibrent, menaçants. Heureusement pour le loup, en fin d’ouvrage, une jolie chanson additionnelle vient corriger ces vilains a priori !

Dominique A. quant à lui renouvelle l’interprétation, trouvant de nouveaux accents, de nouvelles modulations, avec son timbre de voix tendre et moelleux, qui stimule subtilement l’écoute. Dans la présentation de l’œuvre, une note précise que le suivi de l’histoire est rythmé par un tintement de clochette qui incite à tourner la page, mais une fois le stratagème enregistré, l’enfant suivra aisément grâce à la mise en images de Lili la baleine.

Les éditions Maison Eliza ont en effet misé sur l’approche toute en délicatesse de l’artiste plasticienne, dans des tonalités à la fois adoucies et évocatrices, pour permettre aux plus petits lecteurs et lectrices de découvrir l’univers de Petit Pierre. La représentation de la nature y est stylisée, à la limite du fantastique, comme pour marquer l’entrée dans le monde du conte. Les animaux sont aisément identifiables, et l’enfant ne manquera pas de s’amuser à reconnaître tous ceux qui apparaissent sans pour autant être partie prenante de l’histoire. Les personnages sont typés, Pierre avec son violon joyeux nous entraîne dès la première page, et les chasseurs ont cet air un peu naïf de ceux qui font souvent beaucoup de bruit pour pas grand-chose…

Un renouvellement réussi pour cette œuvre irremplaçable.