De travers

Delta et son ami Hypsi habitent au pays de Chiroptéria, la cité des chauves-souris. Chaque nuit, ils se retrouvent en haut du saule pleureur : elle lui montre ses photos qu’elle aime prendre en observant la vie autour d’elle, il lui raconte ses prouesses à la chasse aux moustiques. Pourtant Hypsi n’est pas tout à fait comme les autres chauves-souris : il vole à l’envers, le ventre en l’air, et s’attire les moqueries de ses congénères, ce qui a le don de mettre Delta en colère. Pourquoi se moque-t-on ainsi toujours des personnes différentes ? Cette question pousse Delta à aller chercher des réponses ailleurs. Elle quitte Chiroptéria et croise le chemin de Baba et Lulu les hirondelles, les rates Polka, Do et Mi, Jazz le hérisson. Elle découvre alors que d’autres partagent cette difficulté à accepter ce qui sort de la norme et peut-être aussi comment y remédier. Quand tous ceux qui vont « de travers » deviennent à leur tour la norme, alors les moqueurs d’hier en viennent à se moquer d’eux-mêmes et le monde change… La fin reste néanmoins ouverte – volontairement – laissant au lecteur le soin de cogiter.  

Une histoire sur un sujet souvent abordé, la différence, mais envisagé ici dans une démarche expérimentale comme un support pédagogique par l’imprimerie coopérative Le Cric éditions (Centre de réflexions et d’informations critiques print). Écrit par un collectif d’auteurs – enseignants chercheurs issus de la Haute école pédagogique de Fribourg – sous le nom collectif de Delta, l’ouvrage cherchait surtout à décortiquer les mécanismes qui conduisent à l’exclusion et à amener les enfants, par la prise de conscience, à se positionner. Disponible en trois langues, français, allemand et italien, il est d’ailleurs accompagné d’une mallette pédagogique à l’intention des enseignants. Petit clin d’œil : les auteurs ont aussi substitué au masculin le féminin générique, histoire de mettre d’emblée le lecteur à l’épreuve. Le texte, bien écrit, sans être très original, se lit en mode paysage jouant ainsi la surprise derrière le titre « De travers » et une couverture à l’inverse verticale. Mais le maniement peu ergonomique complique la lecture et ne met pas nécessairement en valeur les illustrations. Celles-ci – signées de Baptiste Cochard, graphiste et motion designer – transportent le lecteur dans un imaginaire science-fictionnel plutôt aride qui peut autant séduire que rebuter.