Un peu de magie dans l'air

Petit Pierre est un peu triste : sa maman est bien fatiguée, elle n’a plus goût à rien… Pour tenter de la distraire, l’enfant s’échappe un instant dans la rue. Il va rencontrer un extraordinaire grand-père et découvrir grâce à lui la magie du monde. Le vieil homme lui confiera même le moyen de rendre le sourire à sa maman.

Un très joli album, dans lequel les auteurs rivalisent de poésie pour exprimer les émotions et susciter les réactions. Le texte, tout en métaphores, ainsi qu'en personnalisations de Fabrice Colin, pare l’aventure de Petit Pierre des couleurs d’une langue expressive, cadencée, où la phrase s’adapte au tableau décrit. Ce travail des mots confère à l’histoire une force qui équilibre le rapport texte-image, et impose la mélodie de cette chanson douce qui charmera les petites oreilles. Adrien Mangournet s’ingénie à peindre un monde chatoyant, inspiré d’images d’une autre époque, où les Dames portaient des jupes à froufrous et les Messieurs redingote et lavallière, où les chevaux tiraient des calèches, et où les vélos avaient une drôle d’allure avec leur roue avant gigantesque ! Un univers de bonbonnière, comme dans Casse-Noisette, où le panachage des couleurs est magnifié par le choix d’un papier glacé.

Toutefois, le texte de Fabrice Colin ne le masque pas, c’est un monde où la pauvreté et le malheur existent aussi, et Petit Pierre en a gros sur le cœur quand il s’en va avec sa pièce d’argent pour tenter de trouver un peu de réconfort à rapporter à sa maman malade, dans sa mansarde sous les toits. Dès lors que le vieil homme entraîne Petit Pierre par-delà l’arc-en-ciel, comme Dorothy dans Le magicien d’Oz, les représentations en plongée de la ville et de la vie renforcent cette impression d’artifice et révèlent un petit univers théâtralisé, une vitrine de jouets, sur lequel les êtres surnaturels règnent et modèlent le paysage. Le dragon fait souffler le vent en bourrasques, quand les nounours font la sieste, leurs ventres rebondis figurent les collines, les lutins font de l’équilibre sur les fils à linge tendus entre les maisons, les ailes colorées de papillons virevoltants réchauffent et adoucissent l’atmosphère… Quand le vieux magicien offre son carnet à Petit Pierre, il lui transmet la force de la magie de l’imaginaire, celle qui transfigure le quotidien et permet de garder l’espoir et de sourire à la vie.

Une belle et réconfortante histoire. Un très beau travail de sensibilisation au rêve éveillé, l’imagination.