Rêveur

Après l’école, Aron et son père se rendent en forêt pour faire quelques pas. Aron est préoccupé, il ne sait pas ce qu’il veut faire plus tard, alors que tous ses camarades de classe, eux, ont leur petite idée : de président, à pompier, en passant par astronaute ou encore archéologue, leur destin semble tout tracé, contrairement à celui d’Aron. Rassurant, le père du garçon lui explique que, dans la vie, il existe trois types de personnes : les penseurs et penseuses (« [p]lus c’est difficile, mieux c’est ! »), les faiseurs et faiseuses (« [q]ui ne restent jamais en place ! ») et les hypersensibles (qui « rendent le monde plus beau »). C’est dans ce troisième groupe que le père d’Aron place son fils, en insistant sur le fait que chacun de nous porte un peu de chaque catégorie et que c’est à nous, finalement, « de découvrir celle qui s’exprime avec le plus de force ». Absorbé par son imagination, Aron finit par être qualifié de rêveur par son père, comme s’il exprimait sous cette ultime dénomination la réunion des trois types énoncés peu avant : ceux qui pensent, qui font et qui « rendent le monde plus beau » sont tous des rêveurs, de façon plus ou moins intense et engagée. L’épilogue confirme cela, puisqu’il établit une liste (non exhaustive bien entendu) de rêveuses et rêveurs célèbres, qu’il s’agisse de chanteurs, de peintres, de politiciens, de scientifiques ou encore de scénaristes… À l’instar de Platon, Mozart, Marie Curie, Claude Monet, Nelson Mandela, la princesse Diana, Lady Gaga, ainsi que Greta Thunberg pour n’en citer que quelques-uns.

Dans cet album, destiné aux jeunes lecteurs, la puissance évocatrice et poétique des illustrations de Mark Janssen jaillit à chaque page. Les couleurs, la précision de son trait et le texte bref incitent l’enfant à pénétrer au cœur de cet univers sylvestre certes, mais surtout touchant et saisissant. L’ouvrage de l’auteur-illustrateur néerlandais met en avant l’hypersensibilité qu’il célèbre avec force. La créativité du jeune Aron transparaît à chaque page et s’accentue progressivement, à tel point que plusieurs images, formes, animaux ou encore créatures de son imagination s’invitent dans cette balade entre père et fils, jusqu’à emmener le lecteur dans le tourbillon des pensées du jeune garçon.

Véritable ode à la différence (à l’image de cette famille pluriculturelle) et à la (hyper)sensibilité, ce magnifique ouvrage prône la singularité comme une force, car « on a tous quelque chose à apporter au monde », tout en exaltant l’importance de rêver, chacun et chacune à son échelle.