3 poissons

3 poissons, 3 couleurs, 1 seul bassin. Comment vivre ensemble ? Ce n’est pas la question qui se pose d’emblée puisque chacun des trois protagonistes vit confiné dans un espace quasi virtuel au sein de « frontières invisibles ». Un poisson bleu à gauche, un rouge au milieu, un vert à droite et ils ne partagent rien. Parfaitement semblables, à part leur couleur, vivant dans des territoires strictement équivalents, en dépit des formes différentes, ils pourraient symboliser une forme d’égalité de conditions.

Hélas non, car le soleil réchauffe plus le bassin du centre, domaine de Poisson rouge. Cette particularité naturelle liée à la course du soleil est bénéfique aux petits vers nombreux qui nourrissent mieux Poisson rouge au détriment de Poisson vert et de Poisson bleu qui, eux « ont très souvent le ventre vide ». Comme la fourmi de la fable, Poisson rouge ne partage pas. Il vit seul, n’aime pas les autres. Chacun s’ennuie… et semble enfermé en lui-même. Le temps fait bien les choses. L’usure fissure le bassin et les travaux de réparation les obligent à vivre ensemble au sein d’un pot commun.

Le style de Rascal, très épuré, donne un relief singulier à cette histoire de vie et de valeurs partagées ou non. Aucune figure humaine dans ce récit, même si l’allusion claire au monde humain transite par une truelle ou une belle main nourricière qui détonnent par rapport aux trois poissons minimalistes. Fidèle à son style, Rascal écrit une fable humaniste, un peu décalée avec sa moralité idyllique presque trop belle pour être vraie.