Barjo

Parce qu’il est premier de la classe (il adore les mathématiques), Daniel est surnommé le « barjo » de sa classe. Tozer, grand dadais, est de ceux qui se moquent de Daniel, bien que lui-même ne soit pas tenu en grande estime par ses camarades. Les deux garçons se rejoignent sur un unique point : leur haine d’Axelmann, le nouveau prof de gym qui ne manque pas une occasion de lancer la classe contre eux. Un séjour sportif en pleine nature va tourner au drame, et faire se révéler les caractères de chacun.
Jouant du suspense avec habileté, Michael Coleman utilise un procédé narratif de retours en arrière : au présent, Daniel, Tozer et Axelmann blessé sont coincés dans une fosse. On ne sait pas pourquoi. Ils attendent les secours. C’est évidemment l’occasion pour les deux jeunes de revenir sur les évènements passés, de commenter les frustrations et les humiliations qu’ils ont connues. Pris alors dans un récit psychologique d’anecdotes variées et cruelles, le lecteur sera surpris par l’arrivée de l’épisode qui a directement conduit les personnages sous terre. Avant de le considérer comme l’aboutissement logique d’une spirale infernale… Le narrateur est le cérébral Daniel, pleinement conscient des injustices qu’il subit. Il entrelace son récit de ses pensées intérieures plutôt torturées, hantées de calculs et de répétitions mathématiques. Quant à Tozer, son ressenti ne sera dévoilé que peu à peu, à travers Daniel, et révèlera un garçon moins dupe et idiot qu’il n’y paraît. L’aventure finit bien, grâce à l’intelligence de Daniel et aux conseils prémonitoires de Solo, adulte bienveillant du roman (son personnage est d’ailleurs un peu trop « attendu »). En quelques heures, les héros ont évolué, compris que leur valeur n’avait rien à voir avec leur caractère différent. Il n’empêche que, fataliste, Michael Coleman ni ne punit les coupables, ni ne transforme le professeur : la dure loi du collège est celle de la jungle... ce que résume bien Tozer : « C’est le démarrage qui compte pour le résultat. » (p. 266). Une leçon de vie hyper-réaliste toute en tensions, aussi réussi que le précédent roman de l’auteur dans cette collection, Filer droit.