Contes de Lituanie

Ces histoires, collectées par Oscar Milosz, poète français d’origine lituanienne, sont déjà parues en 1972. Elles nous transportent dans un pays dur, fier, magnifié avec pertinence par les illustrations de Marc Daniau – couleurs primaires très vives, contours comme taillés au couteau. Les thèmes abordés par les contes sont assez classiques : histoires de couples (Histoire de la vieille qui avait de la malice à en revendre au diable, Le Trésor), victoire des rusés (Les Bourdeurs), revanche des pauvres sur un pouvoir féodal inique (Histoire pleine de sagesse). On note la présence du chat (« astucieux mistigri », p. 54), de la mort sous les traits d’une belle jeune femme (La Marraine), de sorcières (Le Tailleur et le cordonnier).

Si la plupart des contes sont visiblement issus d’une tradition populaire, certains m’ont laissée perplexe, tel Le Prince et le valet infidèle : on y trouve une allusion aux romans osés de Voltaire… On trouvera de même Eloïse et Abélard, Laurence Sterne (auteur de Tristram Shandy). Certes, la Lituanie a sans doute témoigné tout au long de son histoire un intérêt pour la vie culturelle d’Europe de l’Ouest, mais je me demande si le simple paysan en était tenu au courant et pouvait en témoigner. D’où viennent alors ces histoires ?

Je m’interroge encore sur leur intérêt en collection pour la jeunesse : utilisant un vocabulaire soutenu ou bien carrément grossier (parfois dans la bouche d’enfants, p. 14), elles sont visiblement destinées à des adultes. S’ensuit une impression de malaise : si l’on pénètre dans l’imaginaire ancestral véridique d’un pays, on s’attendait peut-être à quelque chose de plus « tendre » pour les jeunes lecteurs. Loin de moi l’idée de plébisciter une littérature jeunesse édulcorée, mais la couleur n’est pas annoncée ici et il n’y a aucun appareil critique. Dommage.