Donne-moi une histoire

A l’heure du coucher, une petite fille proteste. Elle est en chemise de nuit et ne le tolère pas. Il lui faut une histoire… « vite ! ».
Dès la première page, on comprend que Mademoiselle est impatiente, boudeuse et déterminée, un peu tyrannique peut-être ? Dans le dialogue qui s’instaure entre le père et sa fille, les propositions sont réfutées vite et sans appel : pas d’histoire de princesses, ni de sorcières mais une histoire « de chevalièèère ! ». A la hauteur de cette exigence, le père l’élève au grade de chef. Chevalière chef, cela lui convient. Le récit devrait pouvoir commencer. L’armée part en guerre. En guerre ? Non, la chevalière ne veut pas partir en guerre… Tout à sa logique, le père poursuit, les soldats se rebellent, enferment la chevalière qui va être libérée. Oui ! Mais par qui ?

C’est une historie difficile à résumer puisque tout l’intérêt réside dans le tendre dialogue père – fille, la seconde menant le premier par le bout du nez pour le plus grand plaisir des deux protagonistes et des jeunes lecteurs qui s’y reconnaîtront. C’est intéressant également de voir que le père procède par ajustements successifs pour construire une histoire qui agrée à la demoiselle, à chacun de construire la sienne. Les deux registres, scène du coucher, et histoire inventée, se mélangent. La complicité qui existe entre les personnages se teinte d’humour. Le dessin contribue à cette ambiance narquoise. Il emprunte les codes du dessin de caricature. Le père en pyjama, peu glorieux, sa fille très volontaire, les irrésistibles soldats moustachus, tout contribue à la fantaisie. Tendresse et impertinence caractérisent cette histoire et lorsque la petite fille s’endort, on comprend pourquoi elle a le sourire aux lèvres. Une bien jolie façon de traiter les rapports père-fille.