Eva aux mains bleues

Chaque été, Eva passe ses vacances chez sa grand-mère qui habite "une de ces demeures début de siècle que l'on retrouve souvent à l'orée des villes". Eva aime par-dessus tout observer les gens qui l'entourent, à commencer par sa mamie qui guette chez sa petite-fille les premiers signes de puberté, toute fière de l'accueillir dans le monde des femmes, mais aussi la Tatie Nanette, qui ferme tout à clé, le chat borgne Barbarossa, son grand-père qui vit en reclus au fond du jardin –Eva ignore pourquoi-, son jeune frère Antoine qui parle très peu. Elle note tout cela dans ses cahiers, en donnant parfois sa propre interprétation des faits ; elle aime aussi y consigner les bizarreries de sa famille et dresser des listes : listes des choses bizarres et repoussantes, listes des gens pas normaux, liste des mots abscons … Elle attend le moment où finira l'enfance, doucement, sereinement, sans précipitation …

L'adolescente qu'Isabelle Dethan met ici en scène est attachante, belle et heureuse de vivre, finalement. Elle aime les rituels et les petites choses qui font sa vie belle et rassurante. Le mode intimiste qu'adopte Dethan permet aux lecteurs de s'installer avec les personnages, de les regarder vivre et de goûter avec eux à un moment de sérénité. Dethan parle aussi avec délicatesse des moments où la vie bascule, de ce temps fragile où l'on quitte l'enfance. Mais chez elle, cela se fait sans heurt et cela fait du bien. On retrouve ici ce qui avait fait le charme de deux autres de ses livres : Tante Henriette et Ingrid.