Familles

La couverture, tout comme le titre Familles, au pluriel, donne le ton. On y voit, attablés, un père et une mère jouer avec leur fille unique, ou manger à table ; des parents faire la ronde avec leurs deux enfants – un blond, un brun ; un couple uni pousser un fauteuil roulant où est assis leur fils ; mais aussi deux hommes sous un parapluie, un enfant sur les épaules ; une femme seule, un enfant sur les genoux. Les familles sont multiples, leurs représentations aussi. Seule certitude répétée à l’envi : « Chacun de nous, à tout instant de sa vie, sait qu’il peut compter sur sa famille ».

Les personnages entrevus sur la couverture se retrouvent dans différentes situations quotidiennes comme autant de vignettes d’un même grand roman familial déroulé du nord au sud, d’est en ouest. Le matin avant de partir à l’école, à table, malades, en vacances, au moment de dormir, les scènes présentent des variations intéressantes autour d’un point commun thématique qui en fait l’unité centrale. Ainsi manger peut se décliner devant la télé, sur un coin de table ou bien installés dans une salle à manger, ou même dans le lit. Dans la cuisine, Papa peut faire la vaisselle ou un petit garçon cuisiner avec Mamie. On sent la volonté de diversifier les acteurs, les personnages et les situations avec un certain volontarisme pour persuader que c’est bien ainsi. Le texte construit en quatrains rimés conforte cette intention. L’illustration délibérément ancienne contraste avec la modernité du propos et chaque saynète donnera matière à langage pour les petits et discussion avec les plus grands. Quelques histoires s’esquissent : le petit garçon en fauteuil roulant se désole, il a perdu son chien… il le retrouve plus loin ! Les jeunes lecteurs auront plaisir à s’attacher aux personnages. Attentifs les uns aux autres, tous ces personnages forment un petit théâtre, miroir de nos vies.

Cette dimension « militante » de la famille peut mettre mal à l’aise certains enfants qui n’ont pas la chance d’avoir une famille aimante quelle que soit sa forme mais cet album ouvert et chaleureux peut aussi être l’occasion d’échanger sur les aléas de la vie de famille de façon ouverte et décidée : monoparentale, homoparentale, quelle que soit sa configuration, une famille ce sont des adultes (bien) disposés à faire grandir un enfant. Eloge de la transmission, de la solidarité transgénérationnelle, tout en reconnaissant des partis-pris qui peuvent questionner, cet album est un bon support d’échanges. Il permet des lectures multiples et suscite des récits, des émotions et des expressions personnelles.