L’arbre de capulies

1945. Eva quitte l’Italie avec sa famille. Ils rejoignent un parent en Argentine, espérant trouver une vie plus facile après l’Italie fasciste. La jeune fille est plongée dans un univers qui ne cesse de l’étonner. Elle doit s’adapter à un environnement naturel complètement différent : l’arbre à capulies, ces petites baies aigres, lui plaît particulièrement. Par contre, la culture de son nouveau pays la choque : elle appartient à la bonne société blanche, profondément raciste envers les indigènes… alors qu’elle vient de quitter une Europe en proie au démon de l’antisémistisme ! Mais Eva est une nature passionnée, et elle fera fi de tous les commentaires pour se lier avec le jeune indien Atahualpa.

Dans la trilogie qu’Ester Rota Gasperoni consacre à la jeune Eva Rafaelli, L’Arbre de capulies se situe entre Orage sur le lac et L’Année américaine (tous deux à L’Ecole des Loisirs). Longtemps épuisé, en voici une nouvelle édition revue et corrigée par l’auteur. Après la gravité de la Seconde Guerre Mondiale et avant les premiers flirts au collège, il s’agit d’un tome de transition dans la vie de la jeune fille, où elle affirme un caractère entier, franc, passionné, qui préfigure ses aventures en Amérique du Nord. L’arbre à baies est une jolie image qui parcourt le livre. Il symbolise l’estime qu’Eva se porte à elle-même : après avoir imprudemment provoqué la mort de son cheval, elle voudrait abattre celui du jardin ; Atahualpa lui en offre un miniature en gage de son amour. Constitué de tranches de la vie quotidienne d’Eva la narratrice autour de sa famille, on voit bien comment elle se détache peu à peu de la figure marquante du père pour accéder à son indépendance sentimentale et un bref premier amour. L’écriture est simple, directe et vivante, tout en restant soignée. Evidemment, L’Arbre de capulies prend toute sa dimension quand il est lu entouré des deux autres tomes, mais il est aussi un ouvrage sincère et engagé qui vaut déjà le détour de manière autonome ! Une référence de la littérature jeunesse, et de la littérature tout court.