le roi penché

Un bossu, rejeté de tous, considéré comme sorcier, supplie le Soleil de lui donner un enfant. Sa prière est exaucée, et le voilà père de Née-d’un-Œuf, dont la pureté est bientôt convoitée par le terrible Roi penché, dont la couronne plie le dos vers les richesses de la terre, lui interdisant de contempler celles du ciel… A l’origine, cette histoire donne lieu à un spectacle dansé, chorégraphié par Carolyn Carlson sur une musique de René Aubry, qu’il ne nous appartient pas d’analyser ici.
Concentrons-nous donc sur le conte en lui-même. L’ambiance extrême-orientale est esquissée tant dans le thème que dans les superbes illustrations de Chen Jiang Hong, proches de l’estampe : apprentissage des arts martiaux, katana et dragon chinois contribuent à nous mettre sur la voie sans pour autant ancrer le conte dans une culture définie. Si la fin semble un peu rapide, le personnage du Roi penché est tout à fait convaincant : courbé par le poids de son avidité, la perte de sa couronne lui offre une seconde naissance non dénuée de poésie qui évite au conte de tomber dans un manichéisme qu’on était en droit de redouter à la lecture des premières pages.
Mais ne perdons pas de vue qu’il s’agit, à l’origine, d’un spectacle musical : le livre est donc accompagné d’un CD regroupant les musiques originales. Et c’est là que le bât blesse : les morceaux instrumentaux sont accompagnés d’une narration du conte qui ne correspond pas à celle du livre. La structure étant différente, le lecteur est partagé entre l’écoute ou la lecture, sans pouvoir concilier les deux.
Bref, cet ensemble livre-CD présente un intérêt certain pour un amateur du spectacle, qui pourra y trouver, en plus de la bande originale, une approche différente du conte de Marie Desplechin ; mais le lecteur profane risque d’être frustré de n’avoir pas pu profiter de la chorégraphie…