Le secret d'Edith, petite fille cachée

Edith Schwalb a eu le malheur de naître juive, en Autriche, dans les années 1920. Après l’annexion du pays par Hitler, le père solide, la mère, Thérèse la sœur aînée, Edith et bientôt le petit frère Gaston se réfugient en Belgique. Mais cela ne suffira pas, et seuls les bijoux cachés dans une doublure du manteau de la petite fille permettront à la famille de gagner la France dite libre… Le père sera malgré tout arrêté. La mère confie alors Edith et Gaston à Bouli et Shatta Simon, un couple qui a ouvert un centre pour enfants juifs, à Moissac (Tarn-et-Garonne). La ville entière est complice pour protéger les petits clandestins, et Edith retrouve la santé. Malheureusement, un peu plus d’un an avant la fin de la guerre, le centre sera fermé et la jeune fille recueillie sous un faux nom par un orphelinat catholique sévère, puis une famille française peu soigneuse. En compagnie de son amie Sarah, elle supporte la situation en espérant des lendemains meilleurs. Ils arriveront enfin, et la famille se réunira – malheureusement sans le père, décédé à Auschwitz.

Le narrateur externe se centre classiquement sur la vie de ce petit bout d’enfant que l’on voit grandir douloureusement au fil des jours. Le récit est au passé, mais le sujet tellement fort et l’écriture volontairement émouvante que le jeune lecteur a l’impression d’avoir peur, faim et froid avec son héroïne. Il est d’ailleurs répété plusieurs fois qu’Edith a vécu en quelques années tout ce qu’une existence entière ne devrait même pas contenir… De même, ses difficultés sont bien souvent remises en perspective avec les milliers d’autres enfants persécutés en même temps qu’elle. A travers Edith et son expérience personnelle, c’est toute une époque qui se recrée, exclusivement pour le pire. Afin de mieux se placer à hauteur d’enfant, les nazis sont peu présents, et toutes les angoisses d’Edith, sa méfiance croissante, son besoin de sécurité, passent à travers ce qui lui est dit ou demandé par les adultes proches d’elle. A cet égard, Shatta et Bouli Simon tiennent un rôle central, au moins aussi important que celui de la petite fille. Justes parmi les Justes, ils auront triomphé de l’arbitraire et de l’horreur par une inébranlable foi en la vie que l’auteur transcrit avec naturel. Le roman s’émaille de nombreuses photographies en noir et blanc : non, il ne s’agit malheureusement pas d’une fiction… Un solide ouvrage qui saura engager des discussions approfondies.