Domenico, jeune miroitier vénitien, est venu travailler en France pour le roi. Mais le doge de Venise craint que le secret de la fabrication des prestigieuses glaces ne soit éventé, et fait assassiner la famille de Domenico. Avec ses compagnons et un jeune apprenti français, Domenico va se venger.

Annie Pietri ne quitte pas son époque de prédilection – le XVIIème siècle français – tout en changeant de personnage : le héros n’est plus une jeune fille, mais un homme adulte, un jeune père qui travaille. Le ton également diffère, plus violent, sombre (naissance hors mariage – très mal vue en ce temps, morts par assassinats, enfants maltraités…). L’histoire est proche d’un petit peuple urbain loin des fastes de la Cour, même la favorite Mme de la Vallière est connue pour son goût de la discrétion. C’est toujours là l’attrait des romans de l’auteur : se baser sur des faits historiques avérés, tels que l’engouement de l’époque pour les glaces de Venise, faire évoluer des personnages réels, de grandes lignées mais très accessibles – Louis XIV est un homme comme un autre – en compagnie de jeunes héros inventés. Le lecteur croisera D’Artagnan, s’amusera à voir intervenir en alliée de Domenico une femme Monvoisin, future actrice de l’Affaire des poisons ; il anticipera pareillement le projet royal de la Galerie des glaces versaillaise. La simple vengeance directe du jeune miroitier se double d’une intrigue plus compliquée, liée à un échange d’enfants, assez miraculeusement rattaché à Domenico mais crédible en soi. Les dernières pages brossent à grands traits le devenir à long terme des protagonistes, donnant, avec l’emploi d’un narrateur externe, une curieuse impression de retrait pour le lecteur. Moins attachant, mais plus mature, ce dernier roman d’Annie Pietri illustre la capacité de l’auteur à évoluer autour d’une unité temporelle.

Sophie Pilaire