Le sourire de la guerre

Après la Première Guerre Mondiale, la Pologne entre en guerre avec la Russie. En une seule nuit, le village du narrateur Icek est littéralement coupé en deux par une ligne de fil de fer barbelé. Si son ami Moshe habite bien de son côté, le polonais, leur comparse Lev se situe lui désormais en Russie. Juste adolescents, les trois garçons craignent d’être enrôlés dans ce conflit dont ils ne veulent pas, et qui pourrait briser leur amitié, les obliger à tuer ceux qu’ils connaissent depuis toujours. Face à cette impasse, Icek s’enfuit. Son chemin lui fait croiser un jeune coiffeur, barbier, qui fait aussi office de dentiste… Icek sait alors comment éviter la guerre.


Sylvie Baussier s’inspire de son histoire familiale pour broder ce roman cruel que l’on n’oublie pas facilement. Nous suivons les pas d’Icek le gentil, absolument pas lâche mais perdu dans une guerre entamée à des milliers de kilomètres de son petit village. Nous le voyons progressivement passer de l’insouciance à l’inquiétude, puis prendre sa décision un peu rapide, et enfin accomplir le geste fatal – ou salvateur selon le point de vue que l’on adopte. Le titre et l’image de couverture s’éclairent alors d’une signification nouvelle, à rebours de ce qu’elles pouvaient suggérer immédiatement. Tout comme Janne Teller avec son récent Guerre : et si ça nous arrivait ?, Sylvie Baussier parvient à brosser l’horreur de la guerre en une économie de moyens, une concision d’autant plus frappantes qu’il n’y a aucun combat, aucune violence déchaînée. Les dommages collatéraux sont parfois aussi monstrueux que les conséquences directes... A lire le cœur bien accroché, mais à lire à coup sûr.