Winnie L'Ourson

Winnie l’ourson, sa démarche débonnaire, son goût pour le miel, sont reconnaissables de tous. Mais qui a vraiment lu ses aventures ? Publiées en 1926 à Londres, traduites en français en 1946, elles nous paraissent aujourd’hui désuètes, simplement mignonnes. A l’époque, plaçant l’enfant et son imaginaire au centre, elles ont connu un immense succès. Toute la fantaisie et l’humour anglais au service des petits sont là : têtes de chapitres détaillées, situations un peu absurdes menées jusqu’au bout, attention portée aux détails infimes, compositions de mots qui leur donnent du sérieux (« le Meilleur-Ours-du-Monde-Entier »), jeux sur les majuscules très présentes, inventions réjouissantes (les « bilottes », les « éphalants »), petites chansons à répéter à tue-tête…

Christophe Robin (le fils de l’auteur) évolue avec bienveillance parmi tous ses amis animaux (ses peluches dans la réalité, ainsi qu’une ourse du zoo de Londres baptisée Winnipeg, nous dit la petite histoire). Si le narrateur adulte intervient parfois (« je » et « tu » pour Christophe Robin), il laisse la part belle à ce petit monde aux personnalités bien ancrées : Hi-Han le pessimiste, Cochonnet serviable et pas bête, Hibou le sage qui sait – approximativement – écrire, Kangou la maternelle et Rou le feu follet, etc, jusqu’à Winnie, gourmand, un peu stupide, mais le cœur sur la main.

A la fin, ayant sauvé Cochonnet d’un déluge, Winnie reçoit un cadeau de ses amis. Devinez : il s’agit d’une trousse d’école complète… Une autre époque, on vous dit ! Ajoutons à cet ensemble d’une saveur exquise la présence d’une Nature évidente et susceptible de faire évoluer l’action (notamment par la pluie, fréquente), ainsi que des illustrations inventives, au trait fin et pourtant rondes de bonne humeur : un pot de miel tout juste récupéré sur son rayon n’a pas de rival dans cet univers pourtant sucré…

« Christophe Robin était assis devant sa porte, en train de mettre ses Grandes Bottes. Dès qu’il vit les Grandes Bottes, Winnie comprit qu’il allait arriver une Aventure, et il se frotta le nez avec le dessus de sa patte pour en enlever le miel, et il s’arrangea du mieux qu’il put, afin d’avoir l’air Prêt à Tout. » (p. 120)