Conversion

En 2012, dans un lycée privé de filles de Danvers, Massachusetts, les élèves de terminale subissent une épidémie très étrange : convulsions, perte de cheveux... Les symptômes ne permettent pas un diagnostic précis. La sage et douée Colleen en réchappe, mais s'inquiète : Danvers est le nouveau nom du village de Salem, tristement célèbre pour une affaire de sorcières au XVIIe siècle. Et si les troubles avaient traversé le temps ?

Historienne et descendante directe d'une des sorcières condamnées à Salem, l'auteure combine un sens des faits précis et de l'enquête à une affectivité tout en nuances. Sa narratrice Colleen observe d'un ton retenu, poli, ce qui se passe, tout en étant partie prenante du phénomène : stressée par ses résultats, en attente de réponses d'universités, mal à l'aise dans son corps et avec les garçons.
Les « interludes » en 1706 correspondent eux à une réalité historique, et, mis en scène avec suspense, ils viennent éclairer peu à peu d'un autre jour les événements de 2012. Le lecteur est évidemment tenté de faire des rapprochements, des déductions. Effectivement, des traits de caractères entre des personnages d'hier et d'aujourd'hui se retrouvent. Ils restent cependant aléatoires : la vérité ne sera jamais schématique, tout comme la pièce d'Arthur Miller, Les sorcières de Salem (1953), un fil rouge du roman, offrait une interprétation moderne de l'épisode de « sorcellerie ».
L'angoisse de la réussite n'est donc pas forcément la réponse proposée à la « maladie mystère »... tout au plus est-elle suggérée. Il n'empêche qu'à travers les siècles, les femmes demeurent soumises à la difficulté d'être reconnues, simplement appréciées pour elles-mêmes. C'est ce qui fait la force de ce récit captivant : partir du réel pour offrir des visions, tout en laissant le doute et une place à l'imagination. Un premier roman dont on sent que l'auteure le « portait » en elle, et une réussite.