Frozen (T. 1)

Nat (est-ce seulement son prénom?) est née après le Grand Gel qui a laissé la terre exsangue, polluée. Elle est « marquée », c'est-à-dire qu'elle possède un don (télékinésie, mage...) mais elle le maîtrise mal et le cache, notamment à l'armée qui utilise les marqués. Devenue croupière dans un casino de New Vegas, elle vole des jetons afin de payer des passeurs vers le Grand Bleu, territoire mythique où faune et flore subsisteraient. Wes et son équipe de mercenaires se portent volontaires pour l'y emmener. Un long périple à travers glace, détritus et océan toxique commence.

Melissa de la Cruz (Michael Johnston semble être son compagnon) nous avait peut-être habitués à des romans pour filles, il ne fallait pas oublier l'atmosphère fin de siècle de sa série des Vampires à Manhattan. Ici, c'est carrément la fin du monde : dérèglement climatique et déchets dans la mer, les auteurs ne manquent pas d'idées détaillées furieusement réalistes. Ainsi, si la première partie dans les casinos peut sembler assez lointaine à un lecteur français, celle des naufragés maritimes (les pèlerins) rappellera plus ou moins la dramatique immigration clandestine et ses pirates dans l'Union Européenne.
Et puis, il y a ce malaise extrêmement troublant d'une civilisation qui aurait tout perdu, y compris le mode d'emploi de son progrès : les savoirs se sont perdus dans la catastrophe, et on ne fait qu'utiliser ce qui reste sans pouvoir le réparer. A partir d'un genre désormais bien connu et souvent proche de nous (la dystopie), les auteurs brouillent les pistes avec dureté entre fantastique - les marqués, le collier qui sert de carte, le drakon - et désespoir. Même l'histoire d'amour entre Nat et Wes se passe mal, ou alors au second plan. Un premier tome inclassable, donc intéressant.