Quand je serai un animal

« Quand je serai Lapin, avec mes grandes oreilles, j'entendrai tous les secrets des grands. »
« Quand je serai Hibou, je chasserai tous les cauchemars qui traînent dans les forêts. »

L'inconscient collectif attribue aux animaux (noter l'emploi de la majuscule dans l'album) une caractéristique flagrante, physique ou psychologique. Aurélia Alcaïs s'en empare pour jouer au jeu, non des « si j'étais », mais des beaucoup plus troublants « quand je serai ». Une phrase soit limpide, soit rêveuse imagine donc la transformation d'un enfant et ses conséquences. Les envolées poétiques jamais surfaites font réfléchir ou simplement sourire, écrites en grosses lettres sur une double page blanche.
On y trouve par ailleurs l'illustration frappante, parfois un peu inquiétante, du jeune récitant dans son rapport à l'animal. Petit bonhomme collé sur le nez du tigre ou fille-taureau amusée, ils s'intègrent avec force l'un à travers l'autre, en traits fins d'encre parsemés de touches de couleur minimales. L'esthétique est délicate mais d'abord difficile, à explorer doucement en s'appuyant sur le texte. La fin, avec ses masques jouets, remet les choses à leur place, peut-être pour rassurer, peut-être pour encore brouiller les pistes...

Un album original qui fait la part belle au rêve et à l'interprétation par l'enfant lecteur.