Il était une fois... un jour comme les autres

Célia n’aime pas les contes de fées. Elle, elle est farouchement terre à terre comme en atteste sa coupe de cheveux à la garçonne et son allure décidée. Pourtant, lorsque dans une bulle, un lutin apparaît en lui disant qu’elle seule peut sauver Tom, Angèle et Paul, disparus depuis trois jours, elle suit le lutin dans la forêt des contes. Célia, anagramme d’Alice, à la découverte des merveilles et du merveilleux, retrouve les enfants étrangement tristes, transformés en grenouille palmée, en prince ou en fée. Une dose de réalisme doit servir de remède, les nourritures du rêve cèdent devant les tartines du petit déjeuner et les voitures paraissent préférables aux carrosses.
On retrouve des thématiques chères à l’auteur-illustrateur qui excelle dans mélange des genres. Célia est une petite sœur de Marion Duval, elle mène l’enquête mais c’est aussi une exploratrice de l’imaginaire des fées qui brouille les frontières. On s’amuse de voir la confusion des espaces-temps avec cohabitation du réel et de l’imaginaire : les enfants transformés portent aux pieds des baskets d’aujourd’hui qui auraient dû les protéger d’une bascule dans le temps indéfini des contes ! La magie et la poésie du trait d’Yvan Pommaux font merveille : extrême finesse des formes et des couleurs, élégance des visages et des décors, tout un univers tour à tour familier ou distant pour se jouer des stéréotypes du conte et s’amuser des ruses de l’imagination. Néanmoins, la tristesse des personnages enfermés dans la magie nuance l’amusement et cette histoire en demi-teinte plaide pour une méfiance à l’égard du virtuel, et une affirmation peut-être salutaire de se méfier de la magie de papier ou numérique !