Chaque soir à 11 heures

Parce que « parler des émotions qui nous subliment ou nous détruisent, c’est parler de soi », les éditions Flammarion proposent à des auteurs phares de la littérature pour adolescents de choisir un sentiment exacerbé autour duquel ils construiront leur récit : joie, folie, haine, dégoût, honte, passion… Premier opus de cette nouvelle collection « Emotions », le roman de Malika Ferdjoukh se décline autour du thème de l’amour. Cette option de l’auteure, associée au choix éditorial de couverture – une toile de tapisserie couleur framboise – laissent entrevoir de l’eau de rose pour jeunes lectrices assoiffées de beaux sentiments. Détrompez-vous ! S’il y est certes question d’émois adolescents, cette intrigue familiale habilement ficelée éveille aussi suspense et peur. On y retrouve le goût de Malika Ferdjoukh pour les ambiances énigmatiques et ténébreuses, pour les demeures mystérieuses aux couloirs sombres – la bâtisse de « Fausse-Malice » rappellera sans nul doute la « Vill’Hervé » aux fervents des Quatre sœurs –, et son attirance toute particulière pour les familles plutôt hors-normes.

Willa Ayre, la narratrice, fréquente un lycée huppé dont les étudiants sont, pour la plupart, issus des hautes sphères parisiennes. Son amie Francesca, héritière des hôtels Hilbert – et directement inspirée de Paris Hilton –, l’invite régulièrement aux soirées qu’elle donne dans un palace de la capitale. Son frère Iago est le premier à voir en Willa une fille passionnante. Ils vivent tous deux une jolie histoire lorsqu’à l’anniversaire de Fran, Willa rencontre Edern, un adolescent que le décès de ses parents a rendu morne et taciturne. Alors même que le beau Iago devient fuyant, Willa s’approche de la famille d’Edern Fils-Alberne et en découvre le tragique passé. Le décor pailleté laisse ainsi place à une maisonnée aux intensions obscures. Et la plume vive et percutante de l’auteure de s’emballer ! Poursuivie dans la rue, Willa échappe à plusieurs tentatives de meurtre, alors qu’à « Fausse-Malice » la pendule s’arrête chaque soir à 11 heures.

La tension de ce thriller romantique tient le lecteur en haleine jusqu’au final de la page 402. Une fois encore, Malika Ferdjoukh déchaîne les passions et enflamme la blogosphère des passionné(e)s de lecture. Pour ma part toutefois, deux petits bémols troublent l’harmonie de cette partition : le pêle-mêle des ambiances et des situations m’a paru excessif et le contact des richissimes Hilbert… plutôt rebutant.