Petit Navire

La mère de Petit Navire et de Roxane sa sœur aînée est absente. Ils sont gardés par Monsieur Wreck et la buandière, personnages bonhommes et aimants. Les deux petits s’inquiètent pour cette mère qui leur envoie des cartes des montagnes qu’elle est censée escalader. Petit Navire réagit en séchant l’école et écrit sa « vision des choses », tandis que Roxane, excentrique, a soif de toujours plus de connaissances. La mère est malade, elle meurt, mais garde sa place dans le cœur des personnages (« Où que nous allions, elle sera toujours avec nous. », p. 69), qui projettent alors un voyage.

Tout en retenue et délicatesse, Petit Navire ne vous laissera pas indifférent. Sa grande force réside dans le fait que le lecteur (spectateur) sait avant Roxane et Petit Navire la maladie de la mère, et peut ainsi goûter les différents niveaux de compréhension des échanges des personnages, interludes des lettres de la mère compris (« Il en est ainsi de mes voyages, qui veulent s’emparer de moi pour toujours… », p. 55). Hyper-sensibles, les enfants devinent peu à peu – ne l’ont-ils pas toujours su ? - ce que des adultes trop protecteurs auraient voulu leur cacher. La réalité de la mort n’est jamais dite, mais envahit les attitudes de chacun des personnages : Monsieur Wreck est hanté par le temps qui passe, la buandière nettoie furieusement, Petit Navire se réfugie dans son imagination, Roxane dans le concret de l’action… La relation très forte entre les quatre acteurs, faites d’amour et de confiance, permettent aux enfants de se tourner relativement facilement vers l’avenir. Refusant la simplicité fréquente dans les pièces à destination des enfants, Normand Chaurette accumule les doubles sens, les indices subtils, créant parfois des scènes poétiques d’incongruité (un mouton menacé d’empoisonnement au lait…). Et il offre ainsi un texte-quintessence à la langue fine et aux possibilités de mises en scène variées, que petits et grands exploreront selon leurs sentiments.